logo

Mauritanie : première condamnation à mort pour apostasie

Pour la première fois depuis son indépendance en 1960, la Mauritanie a condamné à mort un musulman de 30 ans pour avoir "parlé légèrement" du prophète. Le jeune homme, qui plaide non coupable, s'est évanoui à l'énoncé du verdict.

Mohamed Cheikh Ould Mohamed, un musulman âgé de 30 ans, a été reconnu coupable d'apostasie et condamné à mort, mercredi 24 décembre, à Nouadhibou, dans le nord-ouest de la Mauritanie. C'est la première fois depuis son indépendance en 1960 que le pays condamne un accusé à la peine capitale. L'homme, particulièrement choqué, s'est évanoui à l'énoncé du verdict avant d'être réanimé et reconduit en prison. Face à lui, de bruyantes scènes de joie ont éclaté dans la salle d'audience.

Mohamed Cheikh Ould Mohamed est détenu dans les geôles mauritaniennes depuis le 2 janvier 2014. Son crime : avoir parlé "avec légereté" du prophète Mahomet dans un article publié sur Internet et dans lequel il contestait des décisions prises par celui-ci et ses compagnons durant les guerres saintes. Le jeune homme y accusait également la société mauritanienne de perpétuer un "ordre social inique hérité" de cette époque. Aucune indication n'était disponible dans l'immédiat sur un éventuel recours.

"Mon intention n'était pas de porter atteinte au prophète"

Plusieurs organisations islamiques locales ont soutenu que c'était la première fois qu'un texte critique de l'islam et du prophète avait été publié en Mauritanie.

Le jeune condamné a plaidé non coupable durant son procès, le premier du genre. Devant la cour, Mohamed Cheikh Ould Mohamed avait expliqué que "son intention n'était pas de porter atteinte au prophète, [...] mais de défendre une couche de la population mal considérée et maltraitée, les forgerons", les "maalemines", dont il est issu, a indiqué une source judiciaire. Ses deux avocats commis d'office ont insisté sur son repentir et estimé que cela devrait être pris en compte.

Plus tôt dans la journée, le procureur de la République de Nouadhibou avait requis la peine de mort à son encontre. Une demande suivie par la cour, soulignant que le prévenu tombait sous le coup d'un article du code pénal mauritanien prévoyant la peine de mort pour "tout musulman, homme ou femme, ayant renoncé à l'islam, explicitement ou à travers des actes ou paroles en tenant lieu".

Marches de colère

Au cours des mois de janvier et février, un premier avocat, célèbre dans le pays, Mohameden Ould Icheddou, avait finalement renoncé à défendre le prévenu après des manifestations hostiles à son encontre. Plusieurs marches de colère avaient en effet eu lieu à Nouadhibou et à Nouakchott contre le jeune homme qualifié de "blasphémateur".

Le 10 janvier 2014, des milliers de manifestants avaient même convergé vers le palais présidentiel, où le chef de l'État, Mohamed Ould Abdel Aziz, les avait exhortés au calme en promettant de "prendre toutes les mesures nécessaires pour défendre l'islam et son prophète".

La Mauritanie est une République islamique où la charia (loi islamique) est en vigueur mais dont les sentences les plus extrêmes comme la peine de mort et les flagellations ne sont plus appliquées depuis environ trois décennies.

Avec AFP