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Face à la plongée du rouble, les Russes s’adaptent

La dégringolade du cours du rouble, ces derniers jours, a eu des effets très variés sur le quotidien des Russes. D'Apple aux riches touristes russes, en passant par les petits épargnants, chacun s’adapte comme il peut.

Le rouble se portait légèrement mieux mercredi 17 décembre. Après deux jours de chute libre, la monnaie russe s’est stabilisée en fin de matinée à 68 roubles pour un dollar et 85 roubles pour un euro.

Ce coup d’arrêt est essentiellement dû aux entreprises exportatrices russes qui ont vendu des dollars pour faire rentrer des roubles afin de payer leurs factures de fin d’année, précise l’agence de presse Reuters. La volonté affichée des autorités de tout faire pour soutenir la monnaie nationale a également dû calmer les ardeurs des spéculateurs, souligne de son côté le quotidien économique britannique "Financial Times".

Reste que le rouble a perdu plus de 50 % de sa valeur depuis le début de l’année. Une situation qui rappelle la crise financière de la fin des années 1990 qui avait entraîné la faillite de plusieurs banques incapables de faire face à la demande de devises d’épargnants paniqués. La crise actuelle n’a pas encore produit les mêmes effets, mais les conséquences commencent clairement à se faire sentir sur le quotidien des Russes. Illustration en quatre points.

Du ski à Sotchi. On parlera moins russe dans les Alpes cet hiver que les années précédentes. Pour les classes aisées en Russie, la crise du rouble s’est traduite par des économies sur les séjours à l’étranger. La location d’un chalet dans une station de sport d’hiver d’Europe occidentale revient deux fois plus cher à cause de la chute du rouble, rapporte l’AFP.

"La demande est catastrophique", a reconnu Irina Tiourina, porte-parole de l’Union russe du secteur touristique. Elle estime que les réservations de séjours à l’étranger pour les fêtes étaient en chute de plus de 50 %.

Mais si Courchevel, Gstaad et consorts trinquent, Sotchi a le vent en poupe. L’ex-site olympique, transformé en destination touristique pour amateurs de ski, a même décidé d’augmenter ses tarifs pour profiter de sa soudaine popularité.

Apple arrête de vendre ses produits en ligne. Trop, c’est trop. Face aux "extrêmes fluctuations" du rouble, Apple a décidé d’arrêter de vendre ses iPhone, iPad et autres Mac sur son site russe. "Nous nous excusons auprès de nos clients [russes] pour le désagrément", a affirmé un porte-parole du géant américain. La marque à la pomme a expliqué qu’il était devenu impossible de fixer un prix en cette période d’instabilité monétaire.

"Tous les roubles gagnés en vendant des produits en Russie vont être fortement dépréciés lorsqu’ils seront convertis en euros ou en dollars", souligne à Bloomberg Andrew Bartels, analyste pour le cabinet américain d’études Forrester.

Apple n’ayant aucun magasin en Russie, la vente en ligne est sa principale source de revenus pour ce marché. En 2013, le groupe a écoulé 1,5 million d’iPhone en Russie sur un total de 153 millions d’iPhone vendus dans le monde.

La crise n’existe pas (officiellement). La crise, quelle crise ? Anatoli Artamonov, gouverneur de la région de Kalouga (Russie centrale) préfère parler de "moment incommode" pour qualifier les troubles monétaires et économiques du pays. Mieux, il a officiellement décidé, mardi 16 décembre, de bannir le terme "crise" de tout discours officiel dans sa région.

Il espère que sa méthode Coué permettra de rassurer les investisseurs. Anatoli Artamonov veut profiter de l’occasion pour vanter toutes les incitations qu’il a mises en place pour attirer les entreprises à s’installer dans sa région.

Sauver son bas de laine… en le dépensant. Plusieurs médias russes, tel le populaire hebdomadaire "Argoumenty i Fakty" ("Arguments et faits") conseillent à leurs lecteurs d’aller dévaliser les magasins avant les fêtes de fin d'année. Non pas pour gâter les enfants ou soutenir l’économie russe, mais pour sauver leur épargne.

L’idée est qu’acheter un smartphone, une télévision ou même une voiture vaut mieux que de garder ses roubles. Ces produits peuvent toujours être revendus en ligne en dollars ou en euros, alors que la dégringolade du rouble peut faire perdre beaucoup de valeur aux économies. D'autant plus que les banques ont commencé à limiter la possibilité pour les particuliers de changer des roubles en dollars.

Les Russes semblent avoir trouvé le conseil judicieux, comme le rapporte le quotidien allemand "Frankfurter Allgemeine Zeitung". "Les gens se sont empressés d’acheter les produits technologiques les plus chers pour sauver leurs roubles", confirme au journal Anton Pantelejew, porte-parole de la chaîne de magasins spécialisés MVideo.