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Alors que des chefs d'entreprise battent le pavé contre sa politique économique, le gouvernement de Manuel Valls hausse le ton face à un patronat peu enclin à respecter les principes du pacte de responsabilité.

"Incohérents" et "incompréhensibles". C’est par ces termes qu’un membre de la direction du Medef a qualifié, mercredi 3 décembre, les propos tenus la veille par Emmanuel Macron. Sur les ondes de Radio Classique, le ministre de l'Économie avait en effet pointé la responsabilité du principal syndicat patronal dans "l'échec" que constitue le faible nombre d'accords conclus dans le cadre du pacte de responsabilité.

Propos qu’il a réitérés ce mercredi à la sortie du Conseil des ministres : "Aujourd'hui, la responsabilité en particulier des leaders patronaux, c'est de mener les négociations auxquelles ils se sont engagés et donc aujourd'hui, s'il y a une situation d'échec, je dis c'est la leur, mais je suis convaincu qu'il faut avant tout négocier, avancer, avoir des résultats."

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Projet phare du chef de l’État, François Hollande, le pacte de responsabilité prévoit que chaque branche professionnelle ouvre des négociations pour établir des contreparties aux 40 milliards d'euros de baisses de prélèvements accordées aux entreprises. Or, selon Emmanuel Macron, seuls deux accords ont été signés pour le moment. Pis, la moitié des 50 principales branches professionnelles n'ont toujours pas planifié de négociations.

"Ne pas réclamer plus"

De fait, le ministre de l'Économie reproche au patronat de ne pas jouer le jeu. D’autant que plusieurs organisations patronales, dont le Medef, ont lancé une semaine de mobilisation pour dénoncer, selon les mots de Pierre Gattaz, les "promesses non tenues du gouvernement, qui continue d'augmenter les impôts alors qu'il nous parle d'une baisse de 40 milliards d'euros".

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Les griefs des organisations patronales ne sont pas que pécuniaires : la durée minimale de travail de 24 heures hebdomadaires pour les nouveaux contrats à temps partiel, l'obligation d'informer les salariés en cas de cession de l'entreprise et, surtout, l'entrée en vigueur du compte personnel de prévention de la pénibilité à partir du 1er janvier 2015 sont au cœur du bras de fer avec le gouvernement.

"Je crois qu'aujourd'hui, l'urgence pour le patronat, ce n'est pas de réclamer plus, c'est de prendre sa part de responsabilité avec un dialogue social efficace parce que [...] le dialogue social quand il est bien mené [...] est un facteur de compétitivité", a répondu Emmanuel Macron.

"Un retard à l’allumage"

Cette mise au point du ministre de l’Économie témoigne du changement de ton opéré par le gouvernement, longtemps accusé d’être un peu trop accommodant avec le patronat. Mardi 2 décembre, lors de la séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, le Premier ministre, Manuel Valls, a également rappelé le Medef à l’ordre : "Et je le dis notamment aux dirigeants du patronat, un certain nombre de propositions, de provocations, de propos aujourd'hui ne sont pas à la hauteur de cette responsabilité."

"L'échec, s'il y a échec aujourd'hui, est un retard à l'allumage des organisations patronales, de la part des entreprises", a renchéri le chef de file des députés socialistes, Bruno Le Roux, mercredi sur RFI.

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"Les négociations n'avancent pas assez vite et il faut les accélérer", a pour sa part estimé Louis Gallois, ancien commissaire général à l'investissement et l'un des inspirateurs du pacte. "C'est le contribuable qui fait un effort de 40 milliards", a-t-il souligné sur France Info.

Pour sa part, Olivier Besancenot a donné un tout autre son de cloche. Le porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) a jugé que les invectives échangées ces derniers jours n'étaient que "du spectacle", car le patronat et le gouvernement sont des "partenaires" qui "sont dans la même équipe."

Reste qu’Emmanuel Macron se refuse de croire au fiasco du pacte de responsabilité. "Je suis confiant, optimiste, et j'ai bon espoir que d'ici la fin de l'année, dans les prochaines semaines, on ait de nouveaux accords de branche, a-t-il assuré mercredi. Et mon objectif, c'était d'accroître la pression précisément sur les responsables patronaux, parce que nous leur avons fait confiance, et nous avons fait confiance aux syndicats." Et de conclure : "Le pacte, il est au cœur de notre politique économique, ça doit être un succès."

Avec AFP et Reuters