
Le Burkina Faso a franchi une étape importante vers une remise du pouvoir aux civils par l'armée. Les deux parties ont validé, jeudi, une charte entérinant les institutions de la transition, ce qui a mis fin à de laborieuses tractations.
Une sortie de crise se profile au Burkina Faso. Jeudi 13 novembre au soir, l'armée et les civils sont tombés d'accord sur les institutions de la transition, rendant possible une remise rapide du pouvoir aux civils par les militaires.
"Le présent projet de charte est voté à l'unanimité", a affirmé Henry Yé, président d'une commission intermédiaire, qui rassemblait opposition, autorités religieuses et traditionnelles, société civile et armée.
L'adoption de cette "charte de la transition" a eu lieu en assemblée, sous les applaudissements des quelque 80 délégués présents, qui ont ensuite chanté l'hymne national, dans l'euphorie générale.
"Les Burkinabè ont fait preuve d'une grande maturité"
Près de deux semaines après la chute du président Blaise Compaoré, chassé par la rue après 27 ans de règne, les laborieuses tractations des derniers jours ont finalement porté leurs fruits.
"Ce travail ouvre de nouvelles perspectives à notre pays, surtout à la jeunesse", dont l'avenir sera "protégé", s'est réjoui Ablassé Ouédraogo, ancien ministre des Affaires étrangères et ténor de l'opposition, qui s'est dit "comblé".
"Les Burkinabè ont fait preuve d'une grande maturité. Ils ont réussi là où beaucoup pensaient qu'ils allaient échouer", a commenté Adama Kanazoé, un jeune politicien, qui a qualifié la journée d'"extraordinaire". "Une belle page de notre histoire s'est écrite", a-t-il renchéri.
Barkissa Konaté, membre de la société civile, a fait part de sa "fierté" d'être "une jeune burkinabè". "La révolution est en marche. Maintenant, nous allons avoir une vraie démocratie !", a-t-elle lancé.
Le lieutenant-colonel Isaac Zida, l'homme fort du pays depuis que l'armée a pris les commandes à la suite de la chute du régime Compaoré le 31 octobre, s'était montré rassurant dans l'après-midi.
"L'armée est d'accord avec la charte de transition. Nous sommes parvenus à un accord sur l'architecture même des organes de transition", avait-il affirmé à l'AFP. Mais il restait encore à valider cet accord en assemblée. Une étape désormais franchie.
Que dit la charte ?
La charte, dont RFI a obtenu copie, dispose ainsi que la transition, d’une durée d’un an, devra organiser des élections d'ici novembre 2015. Le président de la transition, un civil, sera nommé par un collège électoral. Il ne pourra être issu d'un parti politique.
Le président de l'assemblée, nommée Conseil national de transition (CNT), sera également un civil. L'armée, qui avait des prétentions sur ce poste, a "cédé" face aux civils, avait reconnu en début d'après-midi Isaac Zida. La chambre comptera 90 membres : 30 pour l’opposition politique, 25 pour l’armée, 25 pour la société civile et 10 pour l’ancienne majorité politique.
Le Premier ministre, désigné par le président, pourra être un civil ou un militaire, selon les délégués. Il sera à la tête d'un gouvernement de 25 membres. "Comme dans une démocratie normale, le président choisira une personnalité qu'il considère avoir les compétences" en tant que Premier ministre, a remarqué Luc Marius Ibriga, un responsable d'ONG, membre éminent de la société civile.
La présence d'un soldat en tant que chef du gouvernement avait été envisagée dans la journée. "La question, c'est : quelle place pour Zida dans l'architecture qui est en train de se mettre en place ?", expliquait un diplomate, pour qui le lieutenant-colonel "se verrait bien Premier ministre". Une option que la communauté internationale ne semble pas disposée à accepter...
Avec AFP