Deux hommes condamnés à mort pour l'attentat ayant tué onze ingénieurs français à Karachi en mai 2002 ont été acquittés en appel. Mais ils ne seront probablement pas remis en liberté, faisant l'objet d'enquêtes pour d'"autres attentats".
AFP - La justice pakistanaise a acquitté mardi en appel, faute de preuves suffisantes, deux hommes condamnés à mort en première instance pour avoir participé à l'attentat qui avait tué 11 ingénieurs français le 8 mai 2002 à Karachi, dans le sud du Pakistan.
Mais ces deux hommes soupçonnés par la police d'appartenir à un groupe armé pakistanais lié à Al-Qaïda ne seront probablement pas remis en liberté car ils font l'objet d'enquêtes pour d'"autres attentats et activités criminelles", ont précisé à l'AFP des responsables du gouvernement de la province du Sind, dont Karachi est la capitale.
Asif Zaheer et Mohammad Rizwan avaient été condamnés à mort par un tribunal antiterroriste le 30 juin 2003 pour avoir participé à l'organisation de l'attentat, commis le 8 mai 2002 devant le Sheraton, l'un des grand hôtels de Karachi.
Ils avaient alors fait appel.
Le 8 mai 2002, un kamikaze avait précipité une voiture bourrée d'explosif contre un autocar transportant des employés de la Direction des constructions navales (DCN), tuant 11 ingénieurs français et trois Pakistanais.
Les victimes françaises participaient à la construction d'un sous-marin.
Il s'agit de l'attaque terroriste la plus meurtrière visant des étrangers au Pakistan à ce jour.
"Après avoir étudié les éléments matériels disponibles, nous considérons que l'accusation n'a pas pu apporter de preuves qui ne laisseraient subsister aucun doute raisonnable à l'encontre des requérants", lit-on dans le jugement rendu en appel par la Haute cour du Sind, et dont l'AFP a obtenu une copie.
"Les requérants sont acquittés des accusations retenues contre eux et sont libres. Ils doivent être remis en liberté sur le champ si aucune autre procédure n'est en cours contre eux", a jugé la Haute cour.
"Nous avons informé des responsables de l'ambassade de France qui m'ont appelé après le jugement que nous allons rapidement introduire un recours en cassation devant la Cour suprême", a déclaré à l'AFP Yousuf Laghari, l'avocat général du Sind, qui représente les intérêts du gouvernement.
Les deux suspects avaient été arrêtés en décembre 2002.
Mohammad Sohail, un troisième homme condamné à mort en même temps qu'eux mais par contumace, avait été arrêté plus tard, en mars 2005. La Cour d'appel a disjoint l'étude de son appel, une enquête étant toujours en cours.
Les enquêteurs le soupçonnent, outre son implication dans l'attentat contre la DCN, d'être un membre important d'un groupe lié à Al-Qaïda, mais surtout, l'accusent d'avoir participé à plusieurs attaques terroristes, dont l'une, en 2003, visant le président pakistanais d'alors, Pervez Musharraf.
Ils soupçonnent même Sohail d'être celui qui a filmé l'exécution du journaliste américain Daniel Pearl, enlevé en janvier 2002 à Karachi et décapité un mois plus tard.
L'attentat contre la DCN n'a jamais été revendiqué.
En janvier 2007, le juge antiterroriste français, Jean-Louis Bruguière, chargé de l'enquête en France avait émis un mandat d'arrêt international contre "un commanditaire présumé". La déléguée générale de l'association française SOS Attentats, Françoise Rudetzki, avait assuré qu'il s'agissait d'un Pakistanais répondant au nom d'Abdul Sahame.
"Le juge Bruguière a acquis la certitude que les intérêts français avaient bien été visés par l'attentat", avait indiqué Mme Rudetzki, déplorant l'absence "d'accord d'entraide judiciaire" entre le Pakistan et la France.