Le pape veut que la béatification de Mgr Oscar Romero, assassiné en 1980, "intervienne rapidement". L’élévation au rang de "bienheureux" de l’ex-archevêque de San Salvador a longtemps été bloquée pour ses sympathies supposées avec le marxisme.
La béatification de Mgr Oscar Arnulfo Romero est-elle imminente ? Dans l’avion le ramenant de Corée du Sud, le pape François a réaffirmé, lundi 18 août, son espoir de voir prochainement le titre de "bienheureux" conféré à cette grande figure de l’Église latino-américaine, assassinée en 1980 par un commando d'extrême droite lors de la guerre civile au Salvador. "Il n’y a plus de blocages idéologiques et il est important que [cette béatification] ait lieu rapidement", a indiqué le souverain pontife devant les journalistes l’accompagnant sur son vol.
Une déclaration qui intervient plus d’un an après que Mgr Vincenzo Paglia, président du Conseil pontifical pour la famille, a affirmé, en avril 2013, que le pape avait autorisé le déclenchement du processus. Le procès de béatification de l’ancien archevêque de San Salvador était au point mort depuis des années en raison des résistances opposées par une frange de l’Église estimant l’ancien ecclésiastique trop proche de la théologie de la libération, un courant de pensée chrétien empreint d’idéologie marxiste.
"Subversif"
Surnommé "la voix des sans-voix" pour son dévouement envers les plus démunis, Mgr Romero avait beau n’avoir que peu d’accointances avec les courants les plus à gauche de la théologie de la libération, son assassinat avait fait de lui une icône dans les milieux progressistes. Durant son ministère sacerdotal, l’archevêque avait notamment pris fait et cause pour les paysans salvadoriens et, comme le rappelle "La Croix", "admis la légitimité, dans certaines circonstances, de l’engagement politique. Dans ses homélies ainsi qu’à la radio, il avait alors commencé à dénoncer les exactions des militaires au pouvoir, se mettant à dos l’épiscopat et la bourgeoisie catholique."
Considéré par beaucoup comme un "subversif", Mgr Romero s’était senti "abandonné" par Jean-Paul II, avait affirmé en 2011 le théologien italien Giovanni Franzoni. Après sa mort, le Vatican a souvent rechigné à lui accorder le titre de "martyr", lui préférant celui de "témoin de la foi". Lundi, le pape François s’est en tous cas dit persuadé que Mgr Romero était "un homme de Dieu".
Les propos tenus lundi par le souverain pontife envoient un nouveau signal fort au clergé latino-américain qui, sans être engagé dans les luttes les plus radicales et sans prendre les armes, a œuvré pour les plus pauvres en prenant de grands risques. C'est la ligne que semble suivre le pape, qui fut, avant son élection, archevêque de Buenos Aires.
L’élévation de Mgr Oscar Romero au rang de "bienheureux" pourrait ensuite ouvrir la voie à une canonisation. C’est ce qu’espèrent en tous cas quatre évêques du Salvador qui verraient bien la sainteté de l’ancien archevêque reconnue en 2017, année du centenaire de sa naissance.
Avec AFP