
HSBC a fermé plusieurs comptes d’associations et organisations de bienfaisance musulmanes au Royaume-Uni. Le géant bancaire, qui se défend de toute discrimination, n’a fourni aucune explication aux personnes concernées.
Les comptes de clients musulmans seraient-ils devenus trop risqués pour la banque HSBC ? C’est ce que se demandent depuis une dizaine de jours des responsables d’associations islamiques et de centres cultuels au Royaume-Uni.
Ils sont plusieurs à avoir reçu une lettre du géant bancaire leur signifiant la fermeture de leur compte, raconte, mercredi 30 juillet, le site de la chaîne britannique BBC. Cette mauvaise surprise ne s’accompagnait, surtout, d’”aucune explication satisfaisante”, souligne le quotidien “The Guardian”.
Au mieux, la banque affirme que la gestion du compte ne rentrait plus dans le périmètre de “l’appétit au risque” de la HSBC. Cette formulation a laissé Khalid Oumar, l’un des gérants des finances de la célèbre mosquée de Finsbury Park, au nord de Londres, sur sa faim. “L’absence de réelles explications nous a poussés à conclure qu’il devait s’agir d’une forme de campagne islamophobe contre les organismes de bienfaisance musulmans au Royaume-Uni”, souligne-t-il à la BBC.
Des comptes d’enfants
Le cas de cette mosquée précise est particulier en raison de son passé sulfureux. Elle était, en effet, dirigée jusqu’en 2005 par le prédicateur fondamentaliste Abou Hamza, reconnu coupable aux États-Unis de soutien au terrorisme en mai dernier. Son dirigeant actuel, Mohammed Kozbar, assure qu’à la lumière de tous les efforts entrepris pour changer l’image de la mosquée de Finsbury Park, il ne s’attendait pas à ça. “Je suis choqué et consterné par cette décision”, affirme-t-il à la BBC.
Même sentiment pour Anas Altikriti, qui dirige depuis 2005, la Cordoba Foundation, un centre de réflexion musulman. Ce natif de Bagdad était client de la banque depuis les années 1980 et n’avait jamais eu de soucis jusqu’à présent. Il est d’autant plus perplexe, que sa femme et ses deux enfants de 16 et 12 ans ont aussi reçu une lettre de la HSBC. “L’argent de poche des enfants peut-il vraiment être en dehors du périmètre ‘d’appétit du risque’ d’un géant bancaire comme HSBC ?”, s’étonne “The Guardian”.
Difficile de savoir combien d’organisations musulmanes ont reçu une telle lettre. La banque refuse de “discuter de ses clients individuels et ne confirme pas si une personne détient ou a détenu un compte [chez elle, NDLR]”. Un porte-parole de la communauté musulmane d’Ahmadiyya, une branche de l’islam, qui gère la mosquée londonienne de Baitul Futuh, la plus grande d’Europe, affirme à France 24 n’avoir pas connaissance d’autres cas. “Cela semble être des événements très isolés”, explique-t-il.
Des cartels mexicains aux musulmans britanniques
Contactée par France 24, la banque affirme ne pas avoir pris ses décisions “en fonction de la race ou de la religion d’un client”. Une telle discrimination serait “immorale, inacceptable, et illégale et HSBC a mis en place des règles pour s’assurer que la race et la religion ne soient jamais un facteur dans une décision bancaire”, affirme l’établissement financier.
Elle explique que ces fermetures de comptes interviennent dans un contexte plus général qui découle de l’amende de 1,2 milliard de dollars infligée à la HSBC en 2012 par les États-Unis et le Royaume-Uni. La banque avait, à l’époque, été accusée de permettre aux cartels mexicains de blanchir l’argent du trafic de drogue. À la suite de cette affaire, elle a entrepris “d’évaluer toutes [ses] activités”. “En conséquence de ce processus nous avons décidé de mettre un terme à nos relations avec des clients dans plus de 70 pays”, assure la HSBC. Parmi ces clients mis à la porte, les associations musulmanes ne seraient finalement que des victimes collatérales.