![Un soldat libanais rejoint le Front Al-Nosra Un soldat libanais rejoint le Front Al-Nosra](/data/posts/2022/07/19/1658230841_Un-soldat-libanais-rejoint-le-Front-Al-Nosra.jpg)
Un soldat sunnite de l’armée libanaise a fait défection, le 22 juillet, pour rejoindre les djihadistes du Front Al-Nosra, la branche officielle d'Al-Qaïda en Syrie. Une première au Liban, en proie à de fortes tensions confessionnelles.
C’est une première dont le Liban, en proie à de fortes tensions confessionnelles entre sunnites et chiites sur fond de crise syrienne, se serait bien passée. Le jeune caporal de l’armée libanaise Atef Saadeddine est en effet le premier militaire à faire défection pour rejoindre un groupe djihadiste. Dans ce cas, le Front Al-Nosra, la branche officielle d'Al-Qaïda en Syrie.
Le 22 juillet dernier, il a quitté son poste d’observation près de Aarsal, localité sunnite qui, dès le début du conflit syrien, a servi de base arrière aux rebelles, pour franchir la frontière avec la Syrie.
Une diatribe anti-Hezbollah
Le soldat, issu de la communauté sunnite, est réapparu deux jours plus tard dans une vidéo postée sur YouTube, dans laquelle il s’est empressé d’expliquer sa démarche. Souriant et détendu, il apparaît sur les images en tenue militaire, avec en arrière-plan un drapeau du Front Al-Nosra accroché au mur. La quasi-totalité de son discours, qui dure un peu plus de quatre minutes, consiste en une attaque en règle contre le Hezbollah, le mouvement politico-militaire chiite.
Cette formation politique cristallise la rancœur d’une frange de la communauté sunnite, notamment depuis l'annonce officielle de son soutien militaire au régime de Bachar al-Assad, par conséquent contre la rébellion composée essentiellement de combattants sunnites. D’aucuns accusent également le Hezbollah, dirigé par Hassan Nasrallah, d’avoir profité du pouvoir que lui confère ses armes pour noyauter plusieurs institutions étatiques, dont l’armée libanaise.
C’est en l’occurrence le principal argument d’Atef Saadeddine, qui affirme que sa défection est motivée par sa conviction que l’armée libanaise et les services de sécurité du pays sont "à la solde" du Hezbollah.
"Une des raisons qui explique ma décision de déserter est l'arrestation et la détention des fils de la communauté sunnite qui subissent des vexations régulières, y compris les dignitaires, ce qui n'est pas le cas dans les régions qui relèvent du parti chiite", affirme-t-il. Et de citer des "exactions contre les sunnites" et "les barrages mis en place par l'armée dans les régions sunnites". Il conclut sa diatribe en appelant ses coreligionnaires à suivre son exemple sans tarder.
"Une initiative isolée"
Les militaires libanais se sont empressés de minimiser l’impact de cette affaire sur les troupes multiconfessionnelles de l’armée, en assurant que cette démarche est "une initiative isolée" d’un "simple déserteur".
Selon une source proche de l'institution, citée par le quotidien libanais "L'Orient-Le Jour", le caporal de 23 ans "souffre de problèmes comportementaux qui ont poussé ses supérieurs à déférer son dossier devant le tribunal militaire". Selon cette source, le soldat "faisait preuve d'un fanatisme outrageant et inadmissible pour l'institution militaire qui prohibe toute forme de discrimination à l'égard des Libanais".
Par ailleurs, plusieurs médias locaux ont rapporté qu’Atef Saadeddine avait récemment écopé de sanctions disciplinaires après avoir tiré des coups de feu en l’air pour exprimer sa joie à l’annonce d’un attentat-suicide qui avait eu lieu dans la banlieue sud de Beyrouth, un bastion du Hezbollah.
Ce n’est pas la première fois que des appels à la désertion sont lancés au Liban. Aujourd’hui en fuite, le cheikh salafiste Ahmad al-Asir, qui a mené des attaques contre l’armée en juin 2013, avait fait de même il y a quelques mois. Un message qui n’avait alors eu aucun écho au sein des troupes en charge de la sécurité d’un pays secoué par les évènements qui frappent le Proche-Orient.