Depuis le 8 juillet, date du début de la crise entre le gouvernement israélien et le Hamas, mouvement palestinien au pouvoir à Gaza, les Américains s’étaient contentés d’appeler à la retenue sans hausser le ton. La donne pourrait bientôt changer.
Crise en Ukraine, chaos en Irak, guerre en Syrie : les sujets d’inquiétude ne manquaient pas pour la diplomatie américaine en ce mois de juillet. Mais c’était sans compter sur le déclenchement, jeudi 17 juillet à Gaza, d’une opération terrestre par l’armée israélienne, après plusieurs jours de raids aériens sur le territoire palestinien, afin de faire cesser les tirs de roquettes visant l’État hébreu. Washington a été rattrapé par le conflit israélo-palestinien, dont l’administration Obama avait fait, dès 2008, une de ses priorités, avant de déchanter.
Jusqu’ici, et depuis le 8 juillet, date du début de la crise entre le gouvernement de Benjamin Netanyahou et le mouvement islamiste Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, les Américains se sont contentés d’appeler à la retenue, de veiller à limiter les pertes civiles, sans hausser le ton ni monter en première ligne. Jeudi, peu après le début de l’opération terrestre, Washington a simplement mis en garde Israël contre "une nouvelle escalade", tout en dénonçant les tirs de roquettes imputés au Hamas.
La Maison Blanche, qui soutient le droit d'Israël à se défendre, avait bien offert sa médiation dès le début de cette crise, mais sa démarche est restée lettre morte. Une implication minimum qui tranche avec celle de 2012, lors du précédent conflit, qui avait contribué à la conclusion d’un cessez-le-feu. Cela étant dit, le Hamas et Israël étaient à l’époque plus enclins à conclure une trêve, et les pressions arabes réclamant à l’allié américain d’intervenir étaient plus importantes.
Une grande lassitude
Selon Gauthier Rybinski, spécialiste des questions internationales à FRANCE 24, la posture américaine s’explique d’abord par la grande lassitude ressentie par Washington vis-à-vis de ce dossier, et sa volonté à peine cachée de se désengager de la région. "On a vu John Kerry, le chef de la diplomatie américaine, faire des navettes infructueuses à n’en plus finir, pour finalement arriver au constat que l’administration Obama n’arrive pas à relancer le dialogue dans le Proche-Orient, et plus particulièrement, même si officiellement les États-Unis disent le contraire, avec le gouvernement Netanyahou", souligne-t-il, en référence aux relations personnelles pour le moins difficiles entre le président américain et le Premier ministre israélien.
En outre, rappelle Gauthier Rybinski, il semble que les Américains soient beaucoup plus préoccupés par les dossiers irakien et syrien. "Pour l'instant, la férocité en Syrie où Bachar al-Assad, au pouvoir depuis 2000, a entamé un nouveau septennat, et en Irak avec la question de l’EIIL, est beaucoup plus forte, aux yeux de Washington, que se qui se passe au Proche-Orient", note-t-il.
Malgré tout, les Américains pourraient être rapidement obligés de monter en première ligne, puisque le déclenchement de l’opération terrestre israélienne change la donne. En effet l’Égypte, autre acteur de premier plan du cessez-le feu de 2012, a perdu son influence sur le Hamas, qui était si utile aux États-Unis. La destitution du président issu des Frères musulmans Mohamed Morsi, en juillet 2013, a ainsi coupé les liens qui existaient entre Le Caire et le mouvement palestinien.
Ce dernier est une émanation de la confrérie islamiste, honnie et réprimée par le nouvel homme fort de l’Égypte, le président Abdel Fattah al-Sissi. Par conséquent, la position américaine pourrait évoluer rapidement. Selon l’AFP, des conseillers ont laissé entendre jeudi que John Kerry pourrait se rendre prochainement dans la région, dans ce qui constituerait la première intervention directe de Washington. Une information confirmée, ce vendredi 18 juillet, par la voix du président Obama, qui s'adressait à des journalistes à la Maison Blanche.
En attendant, c’est la France qui a profité du retrait américain pour tenter de jouer les médiateurs. Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius s’est rendu ce vendredi au Caire, où il s’est entretenu avec le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas avant de mettre le cap sur Israël. Le chef de la diplomatie française a d’ailleurs lancé un appel au Qatar d'user de son influence sur le Hamas, afin de parvenir à un cessez-le-feu.