À Niamey, où il s’apprête à recevoir François Hollande vendredi, le président nigérien Mahamadou Issoufou a accordé une interview à France 24. Il est revenu notamment sur les négociations pour la paix au Nord-Mali en cours à Alger et sur la situation en Libye.
Le président nigérien Mahamadou Issoufou recevra son homologue français François Hollande, vendredi 18 juillet, à Niamey. Cette visite intervient alors que la France s’apprête à remplacer son opération Serval – au Mali – par Barkhane, centrée sur l’anti-terrorisme dans tout le Sahel. S’il sera question de sécurité régionale, des dossiers économiques seront également abordés. À la veille de l’arrivée de François Hollande, Mahamadou Issoufou a accordé un entretien exclusif à FRANCE 24. Tour d’horizon des sujets abordés.
Sur l’opération Barkhane
Mahamadou Issoufou affirme que "le Niger constitue un rempart face aux menaces qui guettent les pays du Sahel". Il souhaite que la sécurité de la région soit assurée "en rapport avec les pays amis dont la France". Selon lui, "l’opération Serval a été saluée par toutes les populations du Sahel compte-tenu de la situation très difficile qui était celle du Mali. Nous félicitons la France d’avoir engagé cette opération qui a permis de stopper les djihadistes au Mali. Mais la lutte contre le terrorisme n’est pas terminée et je crois que c’est pour cela que la France a décidé, en rapport avec les pays de la région, de maintenir une certaine présence dans la région".
Interrogé sur la présence probable de soldats français au Niger dans le futur, Mahamadou Issoufou a déclaré : "Nous sommes ouverts à toute collaboration avec des pays amis, dont la France. Nous travaillons beaucoup d’ailleurs dans ce domaine là avec la France que cela soit dans le domaine des renseignements. J’ai coutume de dire que parfois, sans les renseignements que nous donnent des pays comme la France, nous sommes un peu aveugles. Nous travaillons également au renforcement des capacités opérationnelles de nos forces."
Sur les négociations pour un accord de paix malien qui se déroulent en ce moment à Alger
"Tout n’est pas terminé malheureusement au Nord-Mali. (…) Tant qu'il y aura des mouvements armés au Nord-Mali, on ne peut pas dire que la partie est gagnée mais je fonde beaucoup d'espoir sur ce qui se passe du côté d'Alger. (…) Je pense que les conditions sont en train d'être réunies pour que ces négociations, cette fois-ci, réussissent", explique Mahamadou Issoufou, qui rappelle que "l’Algérie doit avoir un rôle à jouer dans la recherche de solutions aux problèmes qui se posent au Mali".
Pour le président nigérien, "une formule, telle que la décentralisation, est largement acceptable pour toutes les parties". "Je ne pense pas que l’autonomie soit une solution".
Sur une possible intervention internationale pour rétablir l'ordre en Libye
Le président nigérien, l’un des premiers à avoir tiré la sonnette d’alarme sur la situation en Libye, n’appelle pas clairement à une intervention internationale dans le pays sans une demande des autorités libyennes. "Je pense que c'est au gouvernement libyen d'évaluer la situation du pays et de dire sous quelle forme les voisins que nous sommes et la communauté internationale peuvent contribuer à trouver une solution en Libye", juge-t-il. Interrogé sur la présence de bases terroristes dans le sud libyen, Mahamadou Issoufou a botté en touche, ne pouvant le confirmer "de manière formelle", mais rappelant que "beaucoup d’indices le laissent supposer".
Sur la menace Boko Haram
Les décisions de coopération régionale prises au sommet de Paris, en mai 2014, "sont en train d’être mises en œuvre" par le Niger et ses voisins, affirme le président nigérien. "Nous avons beaucoup avancé dans la mise en commun de nos moyens de renseignement. Une structure a été mise en place, dont le siège est à Abuja, et nous avons depuis renforcé nos capacités opérationnelles pour lutter contre Boko Haram."
La présence d’éléments de Boko Haram sur le sol nigérien a déjà été évoquée par le passé. Mahamadou Issoufou confirme qu’"il y a toujours quelques infiltrations auxquelles nous arrivons à faire face".
Sur l’accord avec l’entreprise française Areva concernant l’exploitation de l’uranium au Niger
La finalisation de l’accord signé le 26 mai entre le Niger et le géant français du nucléaire Areva pose encore question. Mais pour Mahamadou Issoufou, "si l’accord a été signé, ça veut dire qu’il a été finalisé". "Je pense que ce qu’il faut retenir, c’est que cet accord est équilibré parce que le Niger aura davantage de ressources fiscales. (…) Au-delà de ça, nous avons prévu une meilleure participation du Niger à la gouvernance des sociétés minières [la Somaïr et la Cominak, contrôlées partiellement par Areva] ce qui lui permettra d’influer davantage dans la maîtrise des coûts. Nous avons également convenu de promouvoir un certain nombre d’infrastructures, en particulier la route de l’uranium [l’axe Tahoua-Agadez-Arlit]."
Sur la situation politique au Niger
Malgré les fortes tensions politiques qui agitent le pays, Mahamadou Issoufou affirme qu'il n'y a "pas de crise politique au Niger". "Il y a des débats entre forces politiques, il y a des affrontements au niveau opinions, au niveau des idées, et cela est une preuve de vitalité de la démocratie dans le pays."
Interrogé sur sa potentielle candidature à sa réélection en 2016, l’actuel président nigérien préfère ne pas se prononcer. "C’est prématuré de l’annoncer. Ce qui m’intéresse pour l’instant, c’est de mettre en œuvre le programme sur la base duquel j’ai été élu. Je ne suis pas, pour l’instant, préoccupé par ce qui va se passer en 2016. "