À l'occasion du défilé du 14-Juillet, des délégations de près de 80 pays ayant participé à la Grande Guerre étaient invitées à Paris. De nombreux représentants des anciennes colonies françaises se sont félicités d'obtenir enfin une reconnaissance.
Vêtus de leur uniforme bleu horizon, fusil à l'épaule, casque Adrian sur la tête, plusieurs dizaines de poilus ont pris possession, lundi 14 juillet, de la place de la Concorde, à Paris. Cent ans après le début de la Première Guerre mondiale, le traditionnel défilé de la Fête nationale a été marqué, cette année, par la présence de cette armée du souvenir.
Tout au long de la parade militaire sur les Champs-Élysées, les clins d'œil à la “Der des Ders” se sont enchaînés. Sur leurs drapeaux, de nombreux régiments de l'armée française ont arboré fièrement les décorations remportées durant le conflit. Sur la plus belle avenue du monde, les noms de Verdun, la Marne, le Chemin des Dames ou encore la Somme ont résonné. Un canon de 75 mm, emblématique de l'artillerie française durant le conflit, a également défilé à la suite des blindés et autres tanks beaucoup plus modernes.
“Ils ont eux aussi été valeureux”
Mais l'hommage le plus émouvant a eu lieu lors de la parade des emblèmes. À l'occasion du centenaire, la France a invité pour la première fois des délégations de 76 pays belligérants de la Première Guerre mondiale. Les drapeaux britannique, canadien, américain, grecque, slovène, japonais, moldave et même allemand étaient présents sur la place de la Concorde. Un hommage aux 10 millions de soldats disparus entre 1914 et 1918, toutes nationalités confondues. “Nous sommes fiers de représenter notre pays. Nous avons participé à l'indépendance du vôtre quand nous faisions partie de l'Empire britannique. Beaucoup de nos soldats ont participé aux deux guerres mondiales”, a ainsi rappelé à France 24 le général de brigade Ozair Ahmed, membre de la délégation pakistanaise.
Les représentants du Congo sont installés non loin, dans l'une des tribunes réservées aux invités. La France a en effet tenu à souligner le rôle très important de ses anciennes colonies lors du conflit. “C'est un honneur exceptionnel d'être invité. Le 14-Juillet, c'est important pour la France, mais aussi pour nous car nous sommes liés historiquement”, explique le colonel Séraphin Okoko, directeur général de l'école du Génie de Brazzaville. Petit-fils d'un adjudant de l'armée française, il ne cache pas son émotion à la vue du drapeau de son pays sur la place de la Concorde, aux côtés de ceux du Mali, du Sénégal ou encore de la Côte d'Ivoire : “Il n'est jamais trop tard pour rétablir l'histoire. De plus en plus la mémoire de 14-18 est en train de se perdre et même celle de 39-45, les événements qui permettent de raviver le souvenir sont importants".
D'autres membres des différentes délégations vont même plus loin. Pour eux, cette invitation permet surtout de réparer une justice. Comme le rappelle Mirghane Abdallah, ancien ambassadeur des Comores en France, longtemps, les soldats des anciennes colonies n'ont pas eu la reconnaissance qu'ils méritaient: “De nombreux Comoriens sont venus en France pendant la guerre pour se battre. Ils ont eux aussi été valeureux. Ils ont été cités à plusieurs reprises. Ils ont eu la Croix de guerre. Ils étaient dans les bataillons somalis ou malgaches, ce qui fait qu'ils ont eu du mal à se faire reconnaÏtre en tant que Comoriens. C'est donc une grande émotion aujourd'hui, surtout qu'il y a 500 000 Comoriens ou d'origine comorienne en France”.
“J'ai l'impression de les représenter”
Un rassemblement pour perpétuer la mémoire de ces soldats morts durant la Première Guerre mondiale, mais aussi pour regarder vers l'avenir. Le défilé s'est ainsi terminé sur une chorégraphie interprétée par des jeunes représentant les 76 délégations. Main dans la main, deux garçons et des filles ont célébré la vie et la paix sur la place de la Concorde en lâchant des colombes. Pendant une semaine, ils ont préparé cette danse, symbole d'ouverture au monde. “Ça montre qu'il est possible de réunir des personnes de différentes cultures et qu'ils s'entendent bien”, raconte avec un grand sourire Dahiyati, des Comores, après la fin du spectacle. “Cela a été vraiment de la joie, de la solidarité, de la découverte et de l'aventure”, ajoute Souleimane, de la Guinée.
Sabrina a pour sa part failli ne pas venir d'Algérie. Durant les jours qui ont précédé le défilé, la présence de sa délégation a en effet suscité une vive polémique à Alger. Alors que certains ont jugé cette participation très malvenue au regard de la colonisation française, la jeune fille est au contraire très fière d'y avoir tenu un rôle: "C'est un événement pour la paix et non pas pour raviver des tensions. Le passé, c'est le passé, il faut faire un pas”. Il y a encore quelques jours, la lycéenne de 19 ans savait peu de choses sur la Première Guerre mondiale et les quelque 23 000 tirailleurs algériens tués durant le conflit: “Nous avons eu beaucoup d'émotions lorsque nous avons vu le film 'Apocalypse'. Maintenant, j'ai l'impression de les représenter. C'était important d'être là pour faire honneur aux Algériens qui ont participé aux deux guerres mondiales”.
Le 14-Juillet a été le premier temps fort commémoratif du centenaire de la Grande Guerre.