Alexander Stubb, le Premier ministre finlandais, a estimé dans une interview parue vendredi que Steve Jobs, ses iPhone et iPad étaient responsables des difficultés économiques que traversent actuellement ce pays de la Baltique.
Steve Jobs, fossoyeur de l’économie finlandaise ? C’est le Premier ministre finlandais, Alexander Stubb, qui l’a affirmé, vendredi 4 juillet, dans un entretien accordé au quotidien danois “Dagens Industri”.
“Steve Jobs a pris nos emplois”, a souligné celui qui est devenu chef du gouvernement finlandais le 17 juin dernier. Il a pris les rênes du pouvoir alors que le pays, entré en récession l’an dernier, a du mal à retrouver le chemin de la croissance et subit une cure d’austérité budgétaire pour apurer ses dettes qui s’élèvent à 60 % du PIB.
En fait, ce jeune homme politique de 56 ans souvent décrit comme “branché” et “sportif”, blâme deux inventions de feu le fondateur d’Apple - l’iPhone et l’iPad - dont le succès aurait, par ricochets, ébranlé l’économie finlandaise.
Le smartphone star de la marque à la pomme est, en effet, souvent perçu comme la bombe qui a fait exploser l’empire Nokia. Le célèbre constructeur de téléphones, racheté en 2013 par Microsoft, a longtemps été le principal moteur économique du pays. Il représentait à lui tout seul le quart de sa croissance annuelle et un cinquième de toutes ses exportations entre 1998 à 2007 (date de la sortie de l’iPhone), d’après le centre de recherche pour l’économie finlandaise (ETLA). La chute de près de 90 % de la valeur de l’action Nokia entre 2007 et 2013 a crée une onde de choc dans le pays.
La Finlande, une économie en bois ?
Mais pourquoi pointer aussi du doigt l’iPad ? C’est parce qu’une autre mamelle de l’économie finlandaise, l’industrie forestière, représente plus de 7 % du PIB. Un secteur qui, jusqu’à récemment, était essentiellement tourné vers la fabrication de pâte à papier. Pas de chance : les iPad et autres tablettes ont changé les habitudes de lecture. Le numérique n’a pas besoin de papier et les exportations de pâtes de bois ont pris un coup : les prix ont chuté de près de 5 %.
Pour autant, Alexander Stubb n’est pas rancunier. Ces innovations made in Apple auraient, d’après lui, forcé le pays à s’adapter. Il cite, notamment, le virage de l’industrie forestière qui se tourne de plus en plus vers les innovations écologiques (biocarburant à base de bois, plâtre biodégradable en bois) pour trouver des débouchés à ses produits.
Reste que Steve Jobs est peut-être un bouc émissaire un peu trop parfait. D’abord, l’arrivée de l’iPhone n’a pas empêché Samsung de prospérer sur le marché des smartphones. Nokia avait d'autres problèmes et l'arrivée de l'iPhone n'aurait servi que de détonateur. "La société, victime de son succès, est devenu arrogante et n'a pas vu les changements qui ont eu lieu dans le secteur", soulignait, dès 2012, Petteri Järvinen, un spécialiste finlandais du secteur des nouvelles technologies qui a travaillé pour Nokia.
En outre, l’iPad est loin d’être le seul, ni même le premier support numérique à avoir donné un coup de vieux au papier. Les liseuses électroniques, dont les célèbres Kindle d’Amazon, existent depuis bien avant 2010 (sortie de la tablette d’Apple) et ont fortement contribué à bouleverser le secteur de l’édition, grand consommateur de papier. Déjà en 2009, une étude du cabinent américain de conseil PriceWaterCooperhouse (PWC) mettait en garde la filière bois contre l'émergence du tout numérique et appelait les professionnels du secteur à s'adapter. Un appel que la filière finlandaise n'avait visiblement pas entendu.