Des milliers de Syriens, en grande majorité pro-Assad, se sont rués, ce mercredi, vers leur ambassade au Liban pour participer en avance à la présidentielle du 3 juin. Réel ou pas, cet "enthousiasme" a semé le chaos à Beyrouth et ses environs.
Le coup d’envoi de la présidentielle syrienne, organisée en Syrie le 3 juin, visant à reconduire à son poste le président Bachar al-Assad, a été donné, ce mercredi 28 mai, à l’étranger. Les Syriens, inscrits sur les listes électorales sont appelés aux urnes dans 43 ambassades à travers le monde. Si le scrutin se déroule généralement sans encombre, comme en Iran, tel n’est pas le cas au Liban, qui accueille plus d’un million de réfugiés syriens.
Plusieurs entrées de Beyrouth sont bloquées depuis mercredi matin par des embouteillages monstre tandis qu’une foule immense s'étend sur plusieurs kilomètres, en direction de l'ambassade syrienne située à Yarzé, à l'est de la capitale. Dans la vague humaine tentant d'atteindre cet unique bureau de vote au pays du Cèdre - qui ne compte aucun isoloir - les drapeaux syriens et les portraits du président Assad sont légion.
Chaos dans la rue
Crainte d’attentat oblige, l'ambassade est placée sous haute surveillance. Les forces de sécurité libanaises bloquent la circulation sur quelques-unes des rues menant au bâtiment et font usage de détecteurs de métaux pour prévenir tout risque de dérapage. Cependant, ces mesures de précaution n’ont pas permis d’éviter des affrontements avec les forces de l'ordre, qui ont eu recours à des jets d'eau pour disperser la foule, frustrée par la lenteur du processus, les électeurs syriens n’étant autorisés à se rendre qu'au compte-goutte vers le bâtiment diplomatique.
"Ces élections sont une réponse à tous ceux qui ont parié sur la chute de la Syrie. Cela démontre que le peuple syrien est attaché à sa terre, à sa patrie et à sa souveraineté", a déclaré à la télévision syrienne l'ambassadeur au Liban Ali Abdel Karim Ali. Face à l’afflux et au mécontentement de ceux qui n’ont toujours pas pu voter, ce dernier a prolongé d’une journée le scrutin eu Liban, après avoir annoncé dans un premier temps que l’ambassade resterait ouverte jusqu’à minuit pour permettre à tout le monde de "d'exercer son droit".
Un vote sous la contrainte ?
Reste à savoir si cet enthousiasme électoral est sincère ou feint. Un article du "New York Times" affirme que des pressions ont été exercées par des officiels de l’ambassade de Syrie au Liban, enjoignant à des réfugiés d’aller aux urnes "s’ils espéraient pouvoir rentrer un jour chez eux". L’ambassade a nié ces accusations, affirmant que ces témoignages rapportaient des propos tenus lors d’un programme d'inscription des électeurs.
Seules les personnes entrées dans le pays du Cèdre par un poste frontière officiel, c'est à dire contrôlés en amont par les autorités frontalières syriennes, ont le droit de voter. Sur le million de réfugiés syriens au Liban, seuls environ 100 000 sont enregistrés sur les listes électorales, en plus de leurs 40 000 concitoyens résidant au Liban, répertoriés par Damas.
Le quotidien libanais francophone "L'Orient-Le Jour" a révélé, de son côté, des opérations "de ramassages organisés" d'ouvriers syriens, qui auraient été effectuées dans une région industrielle au nord de Beyrouth. Selon un industriel libanais, cité par le journal, des hommes, décrits comme étant libanais et membres du Hezbollah, le parti chiite allié du régime de Damas, sont venus rassembler une centaine d'employés syriens. Après avoir pris leurs papiers d'identités, ils les auraient fait monter dans des vans, direction l'ambassade de Syrie. "Selon l'industriel, les employés ne pouvaient pas vraiment refuser d'embarquer à bord des vans", indique "L’Orient-Le Jour".
Avec AFP