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À Londres, une conférence tente de redorer le blason du capitalisme

Le Prince Charles, la directrice du FMI Christine Lagarde et l’ancien président américain Bill Clinton partagent l’affiche de la "Conférence sur le capitalisme inclusif" destinée à réhabiliter un système critiqué depuis la crise de 2008.

Les participants à l’événement organisé ce mardi à la City, le quartier financier de Londres, sont invités à revisiter l’héritage de l’économiste néolibéral Milton Friedman, à réfléchir à la prise en compte du long terme par le patronat ou encore à répondre à la question : "Quel type de capitalisme fonctionne le mieux pour générer de la valeur économique et sociale ?"

L’"Initiative pour le capitalisme inclusif", un groupe de réflexion soutenu par de grands groupes financiers comme McKinsey et E.L. Rothschild, aligne un nombre impressionnants de grands noms parmi les animateurs des débats. On y retrouve l’ancien secrétaire au Trésor américain et professeur à Harvard Larry Summers, le fondateur de Google Eric Schmidt ou encore le président de la Confédération des syndicats allemands Michael Sommer.

Cet effort de ralliement en faveur du capitalisme semble répondre au feu incessant des critiques qui visent ce système depuis le début de la crise financière internationale il y a près de cinq ans, du mouvement d’occupation de Wall Street à la victoire de nombreux candidats anti-austérité aux élections européennes de la semaine dernière en passant par le succès mondial du livre "Le capital au XXIe siècle" de l’économiste français Thomas Piketty.

S’adressant aux participants, la directrice générale du Fonds monétaire international Christine Lagarde a repris les arguments de Piketty sur l’augmentation vertigineuse des inégalités. "Les 85 personnes les plus riches du monde, qui tiendraient dans un bus à étages londonien, contrôlent autant de richesses que la moitié la plus pauvre de la population mondiale, soit 3,5 milliards de personnes", a-t-elle dénoncé.

La finance "continue à valoriser le profit à court terme"

Tout en encourageant les États à aller plus loin dans les réformes – notamment fiscales – pour lutter contre ce phénomène, Christine Lagarde a réservé ses critiques les plus directes pour le secteur financier. Au-delà de la régulation des banques et des marchés financiers, les changements de comportement "ne sont ni assez profonds, ni assez étendus" chez les opérateurs eux-mêmes, a-t-elle regretté.

"Ce secteur continue à valoriser le profit à court terme au détriment de la prudence à long terme, le bonus d’aujourd’hui au détriment de la relation de demain", a déclaré Christine Lagarde.

Elle a appelé à une prise de conscience similaire à celle qui s’est développée sur les questions environnementales : "De la même manière que nous avons un long chemin à parcourir pour réduire notre empreinte carbone, nous devons aller encore plus loin pour réduire notre empreinte financière."

Discours radical du Prince Charles

Le Prince Charles a abondé dans le même sens. Dans un discours aux accents révolutionnaires inattendus chez un membre de la famille royale britannique, il a appelé à "une transformation fondamentale du capitalisme mondial".

L’héritier du trône a appelé les capitalistes à prendre en compte "le capital social et environnemental" en mettant l’accent sur l’emploi des jeunes, le soutien aux plus démunis et la lutte contre le changement climatique des priorités.

"C’est une priorité absolument cruciale pour des millions de pauvres ruraux, dont 350 millions rien qu’en Inde sont dépendants des services que procure l’écosystème", a déclaré le Prince Charles.

L’ancien président américain Bill Clinton doit clôturer la conférence mardi soir.

L’événement devrait selon ses organisateurs contribuer à "renouveler le capitalisme" à la lumière des "sérieuses dislocations causées par [son] développement ces 30 dernières années : l’augmentation des inégalités de revenus à l’échelle mondiale, les scandales financiers à grande échelle et l’effritement de la confiance du public dans les entreprises, le chômage persistant à des niveaux historiquement hauts et l’approche à court terme des propriétaires et des gestionnaires d’entreprises".