
L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE)a sanctionné, jeudi, la Russie en privant les 18 députés russes de leur droit de vote. Une décision prise en réponse à l'annexion de la Crimée par Moscou.
La délégation russe au Conseil de l’Europe n'est plus la bienvenue à Strasbourg. L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) a décidé, jeudi 10 avril, à une large majorité (145 pour, 21 contre et 22 abstentions) de priver les 18 députés russes de vote jusqu'à la fin de l'année. Cette décision vise à marquer la "condamnation" et la "désapprobation" face à la "grave violation du droit international" qu'a constitué, selon l'Assemblée, l'annexion de la Crimée.
"Suspendre les droits de vote, c'est une mise en garde claire pour M. Poutine et son régime", a argumenté le député danois Michael Aastrup Jensen, qui a qualifié de "honte" la violation par Moscou des "principes fondamentaux de l'Europe".
"Il faut donner un signal fort pour dire qu'on ne peut pas agir ainsi", a souligné de son côté le chef de file des députés ukrainiens à l'APCE, Ivan Popescu. "C'est nous qui sommes concernés" par les agissements russes, "mais demain n'importe quel pays peut l'être", a-t-il ajouté.
Cette sanction implique également que les députés russes ne pourront plus non plus siéger dans certaines instances dirigeantes de l'Assemblée, ni participer à des missions d'observation d'élections. Ces mesures valent jusqu'au prochain renouvellement de l'APCE qui coïncidera avec le début de sa prochaine session annuelle, le 26 janvier 2015.
En outre, l'assemblée européenne "se réserve le droit" d'aller plus loin encore, en excluant de facto les élus russes si Moscou "ne fait pas marche arrière sur l'annexion de la Crimée", affirme la résolution.
Moscou dénonce une décision russophobe
Dénonçant une "farce politique" et un déferlement de "russophobie", la délégation russe avait boycotté jeudi matin le débat préalable à cette décision. Après le scrutin, son chef de file Alexeï Pouchkov a laissé entendre que les 18 élus russes pourraient quitter l'APCE, où leur présence n'aurait plus "aucun sens". Une décision à ce sujet sera prise dans les semaines à venir, a précisé M. Pouchkov.
C'est la quatrième fois depuis la création du Conseil de l'Europe en 1949 qu'une telle mesure est mise en œuvre. La dernière fois, c'était en 2000, déjà contre la Russie : il s'agissait alors de réagir au lancement par Vladimir Poutine de la deuxième guerre de Tchétchénie.
Moscou avait déjà signifié qu'il n'accepterait aucune sanction de l'instance strasbourgeoise sans réagir.
L'APCE - dénuée de pouvoir législatif, mais destinée à favoriser le dialogue, notamment sur des questions liées à la démocratie et aux droits de l'Homme - réunit à Strasbourg 318 députés, issus des parlements nationaux des 47 pays membres du Conseil de l'Europe. Parmi eux, on compte 18 Russes et 12 Ukrainiens.
"Ne pas revenir à la guerre froide"
Pendant le débat, un certain nombre d'élus - notamment ukrainiens et géorgiens - avaient plaidé pour une telle mesure radicale. Mais d'autres orateurs ont souligné la nécessité de maintenir la possibilité d'un dialogue avec Moscou. Au final, le texte adopté souligne que "le dialogue politique doit rester la voie privilégiée pour trouver un compromis" et qu'il "ne faut pas revenir à l'exemple de la guerre froide".
Mercredi après-midi, l'APCE avait débattu, en présence des députés russes, des "menaces" pesant sur la démocratie ukrainienne, ce qui avait donné lieu à de vifs échanges entre élus russes et ukrainiens.
À l'issue de ce débat, les parlementaires russes n'avaient pu empêcher l'adoption d'une résolution affirmant que le "soi-disant référendum" tenu en Crimée était inconstitutionnel et dénonçant "l'annexion illégale" de la Crimée par la Russie.
Avec AFP