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Le futur ambassadeur iranien à l'ONU accusé d’être un ex-preneur d’otages

Les sénateurs américains ont voté une loi, lundi, pour empêcher le prochain ambassadeur de l'Iran à l'ONU d'entrer aux États-Unis. Ils l'accusent d'être lié à la prise d'otages de l'ambassade américaine à Téhéran en 1979.

Washington et Téhéran sont sur le point d’engager un énième bras de fer diplomatique. La querelle concerne cette fois l’ambassadeur désigné par l’Iran pour le représenter auprès des Nations unies. Et pour cause, le diplomate en question, Hamid Aboutalebi, est accusé par les États-Unis d’être lié à la prise d'otages de l'ambassade américaine à Téhéran en 1979, peu après la révolution islamique.
De quoi provoquer le courroux de l’administration américaine. "Les États-Unis ont fait part à l'Iran de leurs inquiétudes à ce sujet", a déclaré, la semaine dernière, Marie Harf, la porte-parole adjointe du département d'État. Celle-ci avait déjà souligné par le passé que la nomination de Hamid Aboutalebi serait "extrêmement troublante".
À première vue, cette question est moins critique que les négociations nucléaires avec les Iraniens, qui vont bon train, mais elle est de nature à empoisonner les relations entre les deux pays, pourtant apaisées depuis l’arrivée au pouvoir du président Hassan Rohani, en juin 2013.
Téhéran a formulé il y a quelques mois une demande de visa pour Hamid Aboutalebi, sans obtenir jusqu’ici le précieux sésame. Toutefois, s'il l’obtient, il pourrait prendre ses fonctions à New York dès le mois de juillet. Ce qui aurait pour conséquence de rendre ses conversations avec les Américains "toxiques", selon un ancien diplomate du Département d’Etat cité par le "New York Times".
Les sénateurs sonnent la charge
Mais cette éventualité semble de moins en moins probable. En effet, les sénateurs démocrates et républicains, qui ont uni leurs voix à cette occasion, ont pris les devants en votant, le 7 avril, un texte de loi visant implicitement à empêcher le diplomate iranien d’obtenir un visa.
Le texte, proposé par le sénateur républicain du Texas Ted Cruz, interdit de séjour sur le territoire américain tout représentant auprès des Nations unies ayant pris part à des actions d’espionnage contre Washington, qui présente une menace pour les sécurité nationale ou les intérêts du pays, ou encore ayant pris part à des activités terroristes contre les États-Unis.  
Ted Cruz, proche du Tea Party et potentiel candidat à la primaire républicaine pour la présidentielle de 2016, a estimé que la nomination de Hamid Aboutalebi était "une insulte délibérée" de l’Iran à l'encontre les États-Unis. "On ne peut pas accepter qu'au nom du protocole diplomatique international, les États-Unis soient obligés d'accueillir un étranger qui a montré un manque de considération brutal pour nos diplomates quand ils étaient en poste dans son pays", a-t-il déclaré pendant la campagne qu’il a mené contre le futur ambassadeur iranien.
Selon les médias américains, la Chambre des représentants devrait également approuver cette loi, qui entrera alors en vigueur dès qu’elle sera signée par le président Barack Obama.
En principe, Washington est obligé d'accorder des visas aux diplomates travaillant à l'ONU, dont le siège est basé  à New York. Marie Harf, la porte-parole adjointe du département d'État, avait cependant rappelé qu'il pouvait exister des exceptions "en certaines circonstances". Le vote de cette loi va dans ce sens.
Traducteur ou preneur d'otages?
Dans un entretien publié en mars par "Khabar Online", Hamid Aboutalebi, diplômé de la Sorbonne et qui fût notamment ambassadeur de l’Iran en Australie, en Belgique et en Italie, a nié de son côté avoir participé à la prise d’otages de novembre 1979. Des étudiants avaient pris d'assaut l'ambassade, réclamant l'extradition du Shah d'Iran, alors hospitalisé aux États-Unis. Hamid Aboutalebi serait seulement intervenu comme traducteur quand les étudiants ont relâché les premiers otages, tandis que 52 prisonniers ont été retenus durant 444 jours. Une version confirmée par les responsables du groupe en question, intitulé "Les étudiants musulmans partisans de la ligne d'Imam", en référence à l'ayatollah Khomeini, fondateur de la République des mollahs.
Selon l’un d’entre eux, Ibrahim Asgharzadeh, interrogé par le "New York Times", cette polémique fait le jeu des tenants d’une politique de fermeté à l’égard de l’Iran. "Je pense que les ultras-conservateurs [américains, NDLR] essayent de retarder les progrès de l’équipe diplomatique du président Rohani et créer des obstacles en inventant l’histoire selon laquelle Aboutalebi était l’un des preneurs d’otages", explique-t-il.
Quelle que soit l’issue de cette nouvelle affaire, cette querelle illustre bien, malgré l’avancée sur le dossier nucléaire iranien, la difficulté de restaurer des liens de confiances entre ces deux puissances.

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