logo

Sur FRANCE 24 : "Assia, 23 mois, plus jeune otage française en Syrie"

Meriam Rhaiem exhorte les autorités françaises à reconnaître le statut d'otage pour sa fille âgée de 23 mois, enlevée par son père le 14 octobre 2013. Ce dernier, accompagné de sa fille, est parti combattre en Syrie aux côtés de djihadistes.

Elle n’a pas vu Assia, sa fille de 23 mois, depuis le 14 octobre 2013. Ce jour-là, l’ex-compagnon de Meriam Rhaiem, dont elle est séparée depuis juillet 2012, ne ramène pas l’enfant chez elle. Il a décidé de l’emmener en Turquie, après lui avoir fait établir un passeport. Son but ? Partir en Syrie avec la fillette pour combattre le régime de Bachar al-Assad au sein du groupe djihadiste Front al-Nosra. Après cinq mois d'angoisse, marqués par le dépôt de plusieurs plaintes et de multiples démarches, la jeune femme entend aujourd'hui alerter l'opinion. Mardi 25 mars, FRANCE 24 a recueilli son témoignage.

FRANCE 24 : À quand remontent les dernières nouvelles de votre fille ?

Meriam Rhaiem : Les dernières nouvelles de ma fille remontent à fin janvier. J’ai reçu un appel d’un numéro syrien. J’ai pu parler à mon ex-mari qui m’a expliqué que tout allait bien et qu’il préférait que ma fille meurt en martyre plutôt qu’elle revienne en France. À l'autre bout du fil, j’ai pu entendre ma fille me réclamer.

Le père de votre enfant avait-il manifesté des signes d’un départ prochain en Syrie ?

Aucun signe ne laissait présager qu’il partirait en Syrie. Je m’étais séparée de lui en juillet 2012 en raison de sa radicalisation religieuse. Il s’était isolé, coupé du monde. Aucune discussion n’était devenue possible avec lui. Mais de là à penser qu’il puisse partir en Syrie, je ne l’aurais jamais imaginé ! Le sujet n’a jamais été abordé.

Quand et comment avez-vous appris la nouvelle pour votre fille ?

Comme nous étions séparés depuis un an et demi, il avait un droit de visite. Il venait régulièrement voir sa fille. Et ce fameux 14 octobre 2013, il est venu comme d’habitude. Il a prétexté emmener notre fille faire les magasins mais il n’est jamais revenu. Il m’a expliqué qu’il la gardait pour le jour de l’Aïd, qui tombait le lendemain, le 15 octobre. Ce jour-là, il a rappelé pour me dire qu’il partait deux ou trois semaines en vacances avec Assia. Il a refusé de me préciser la destination. Les deux mois et demi suivants, j’ai fait toutes les démarches nécessaires pour essayer de retrouver ma fille. Aujourd’hui, je me pose de nombreuses questions. Comment peut-on obtenir un deuxième passeport sans que l’autre parent ne soit au courant. Pourquoi faut-il attendre cinq jours pour pouvoir porter plainte pour soustraction de mineur ? Pourquoi faut-il deux mois et demi pour lancer un mandat d’arrêt international ?

Qu’attendez-vous aujourd’hui des autorités françaises ?

J’attends que l’on donne à Assia, qui est française, âgée de 23 mois, enlevée à l’âge de 18 mois sur le sol français par un Français, un statut officiel d’otage.

À ce jour, j’ai été reçue à l’Élysée, par un conseiller de Justice du président de la République, à qui j’ai accordé ma confiance. J’ai reçu, par la suite, un courrier de l’Élysée me confirmant que la garde des Sceaux suivait mon dossier. Mais depuis, les autorités en charge de mon dossier se comportent comme si ma fille était en vacances. Pour eux, il s’agit d’un simple Français qui est parti en Turquie avec un enfant, alors qu’ils savent bien qu’elle est actuellement en Syrie avec un groupe armé de djihadistes. Elle est séquestrée depuis 5 mois et j’aimerais que l’on dise la vérité devant les 66 millions de Français : dire qu’Assia, âgée de 23 mois, est la plus jeune otage française.

Mon combat, c’est qu’il n’y ait plus d’autres Assia. Chaque jour je me demande si elle boit, mange, se lave et qui s’occupe d’elle. Je suis dans l’angoisse à chaque seconde qui passe.