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Un opposant au rattachement de la Crimée à la Russie retrouvé mort

Reshat Ametov, un Tatare opposé au rattachement de la Crimée à la Russie, a été retrouvé mort dans une forêt proche de Simferopol. Human Rights Watch dénonce, mardi, un climat de violence qui règne en Crimée depuis plusieurs semaines.

"En Crimée, il n’y a eu aucun affrontement militaire armé. Il n’y a eu aucun coup de feu, aucune victime". Vladimir Poutine, dans son intervention devant le Parlement russe, mardi 18 mars, s’est félicité du climat de paix dans lequel s’est déroulé le déploiement russe en Crimée. Mais la réalité se révèle bien moins plaisante. Derrière le calme apparent que décrit le président russe règne la violence, comme en témoigne un communiqué de l’ONG de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch.

L’histoire de Reshat Ametov ressemble étrangement à celles de ces opposants au président déchu Viktor Ianoukovitch : Dmytro Boulatov, Igor Loutsenko et Iouri Verbisti, enlevés à Kiev et laissés pour morts dans une forêt à proximité de la capitale ukrainienne. Les deux premiers ont survécu, pas le troisième. Reshat Ametov, un Tatare de Crimée opposé au rattachement de sa province à la Russie, a lui aussi été retrouvé mort dans une forêt à 45 km de Simferopol.

L’homme de 39 ans, père de trois enfants, a été vu vivant pour la dernière fois le 3 mars. Il participait, dans la matinée, à une manifestation pacifique contre la présence russe en Crimée, devant le siège du gouvernement de la région. Plusieurs témoins rapportent avoir vu trois hommes en uniforme, sans signe distinctif, emmener Reshat Ametov hors de la place où se déroulait la manifestation. La scène a été filmée par la chaîne locale ATR.

"Climat de non-droit"

À partir de cet instant, il n’a plus donné signe de vie. Sa famille a signalé sa disparition auprès du commissariat de police, sans succès. Ses proches ont remué ciel et terre, interrogé tous les témoins, en vain. Le 16 mars, son corps a été retrouvé. Selon la presse locale, il portait des marques de torture. De la bande adhésive enroulait sa tête et liait ses mains. Human Rights Watch n’a pas pu vérifier ces allégations, mais selon un proche de la victime, la police a qualifié sa mort de "violente", dans son rapport. La famille n’a pas encore pu récupérer le corps de Reshat Ametov, ni obtenir de certificat de décès.

"La disparition et le meurtre de Reshat Ametov illustre le climat de non-droit qui s’est installé en Crimée au cours de ces dernières semaines, rapporte Rachel Denber, spécialiste de l’Europe et de l’Asie centrale pour Human Rights Watch. Les autorités de Crimée ont le devoir de mener une enquête approfondie sur cette affaire et d’en punir les responsables, quels qu’ils soient".

Récemment, Human Rights Watch a condamné des agressions commises par des milices d’autodéfense de Crimée et des militaires non identifiés dans la région. "Pendant des semaines, des hommes masqués refusant de s’identifier ont multiplié les intimidations et les passages à tabac, poursuit Rachel Denber. L’échec des autorités à mettre un terme à ces agressions et leur incapacité à mener des enquêtes ont renforcé le sentiment d’impunité des responsables de ces abus."