Une grande manifestation pro-russe s'est tenue, samedi à Donetsk, bastion russophone de l'est de l'Ukraine. Des milliers de partisans d'un ralliement à Moscou rassemblés place Lénine ont défié le Parlement de Kiev dans un climat de tension.
Des milliers d’Ukrainiens pro-russes se sont rassemblés, samedi 8 mars, dans les rues des bastions russophones de l'est de l'Ukraine pour exprimer leur soutien au Kremlin. Ces manifestations se déroulent, alors qu'en Crimée, où le Parlement local défie l'autorité de Kiev, les tensions restent vives entre soldats ukrainiens et russes.
À Donetsk une foule de plusieurs milliers de manifestants s'est rassemblée en début d'après-midi sur la place Lénine, brandissant des drapeaux de la Russie ou de la "Russie de Kiev", berceau historique des États slaves d'Ukraine, de Russie et de Biélorussie.
Ce bassin minier frontalier à la Russie a déjà connu plusieurs jours de tensions entre partisans de Moscou et défenseurs de l'unité de l'Ukraine. Les partisans d'un ralliement à la capitale russe ont occupé pendant trois jours l'administration régionale et avaient hissé le drapeau russe blanc bleu rouge, avant d'être délogés par la police jeudi.
it"Atteinte à l’intégrité nationale"
"Nous sommes des gens pacifiques, nous voulons la paix", a déclaré à l'AFP Larissa Koukovina, une retraitée en doudoune et bonnet roses venue manifester. "Nous voulons un référendum pour rejoindre la Russie parce que nous savons que le niveau de vie est bien plus haut là-bas qu'ici. Chez nous, c'est la misère", a expliqué l’une des manifestantes.
Alexeï, 37 ans, a, lui, la dent dure contre les régions de l'ouest ukrainien qui "vivent avec l'argent" des régions minières et industrielles de l'est, frontalières à la Russie. "L'Ukraine est une partie vitale d'un grand pays [la Russie, NDLR], des traîtres nous ont séparés, Gorbatchev a divisé notre patrie en 15 parties", dit-il en référence à la dislocation en 1991 de l'Union soviétique.
Signe que les autorités prennent la menace russe au sérieux, la justice a ouvert une enquête sur l'"atteinte à l'intégrité nationale" contre Pavel Goubarev, un homme d'affaires local propulsé leader des pro-russe, au même titre que les dirigeants de Crimée qui ont demandé le rattachement à Moscou. Il avait été arrêté jeudi et risque dix ans de prison.
À Kharkiv, autre centre industriel de l'Ukraine, plus de 4 000 manifestants pro-russes ont manifesté, également samedi, dans le centre de la ville en agitant des drapeaux russes ou du "Bloc russe", le mouvement politique pro-russe auquel appartient le "Premier ministre" de la région séparatiste de Crimée, Sergiï Axionov.
"Pendant les événements de Maïdan, ici nous vivions en paix"
Dans la péninsule de Crimée, passée fin février sous le contrôle des forces russes et où le Parlement local a annoncé un référendum le 16 mars pour le rattachement de la région à la Russie, une manifestation a réuni 300 partisans de l'intégrité de l'Ukraine.
Le chiffre peut paraître faible mais les manifestations anti-séparatistes sont très rares en Crimée. La plupart des manifestants à Simféropol étaient des femmes, sorties "dans la rue avec leurs enfants pour protester contre l'intervention des forces russes en Crimée", selon Elvina, l'une d'entre elles.
"La Crimée a été envahie par les forces armées russes, par des bandits appelés cosaques. Nous allons boycotter le référendum. Il est illégal", a déclaré pour sa part Victoria, une autre manifestante.
"Pendant les événements de Maïdan, ici, nous vivions en paix, alors que le sang coulait à Kiev", estime Vera, en référence à la répression qui a fait 100 morts en trois mois dans toute l'Ukraine. "Et l'arrivée de ces forces armées a mis le feu aux poudres", déplore Vera.
Demi-tour des observateurs
Sur la scène diplomatique, malgré d'intenses consultations tout au long de la semaine, Occidentaux et Russes n'ont pas réussi à trouver une issue à la pire crise dans leurs relations depuis la chute de l'URSS.
Alors que chaque protagoniste réfute l'idée d'une nouvelle Guerre froide, la Russie a annoncé, samedi, réfléchir à une suspension des inspections étrangères de son arsenal d'armes stratégiques, y compris les missiles nucléaires, en réponse aux "menaces" venant des États-Unis et de l'Otan.
Les inspections ont lieu dans le cadre du Traité de réduction des armes stratégiques (START) passé avec les États-Unis, et dans celui du Document de Vienne entre les pays membres de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE).
Les observateurs militaires de l'OSCE, qui tentaient, samedi, pour la troisième fois en trois jours de pénétrer en Crimée ont fait demi-tour au moment où des hommes présents à un poste de contrôle ont tiré en l'air, a déclaré à l'AFP une source au sein de cette mission de l'OSCE.
Avec AFP