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Le gratin de la diplomatie mondiale au chevet d'un Liban fragilisé

Une conférence du Groupe international d'appui au pays du Cèdre, organisée le 5 mars à Paris, doit fournir une aide financière et militaire au Liban, en proie à une crise économique, sécuritaire et humanitaire, conséquences du conflit syrien.

Soutien et stabilité pour éviter la contagion syrienne. Tels seront les maîtres-mots de la conférence du Groupe international d'appui au Liban, organisée par le Quai d’Orsay à Paris, mercredi 5 mars, dans le but de fournir une aide économique et militaire au pays du Cèdre. À en juger par les personnalités politiques présentes, les enjeux sont loin d'être anodins : participeront notamment Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères, John Kerry, chef de la diplomatie américaine, de leur homologue russe, Sergueï Lavrov.

L’Allemagne, l’Union européenne (UE), la Ligue arabe et l'Arabie saoudite, seront également représentées au même titre que la Banque mondiale et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Du côté libanais, le président Michel Sleimane, qui doit être reçu au palais de l'Élysée par le président François Hollande, sera accompagné de plusieurs ministres et d’une délégation de diplomates de haut-rang.

Faire face à une triple crise

Cet évènement tombe à point nommé pour le Liban, un pays qui, jusqu’ici, a miraculeusement réussi à ne pas sombrer dans le chaos bien qu’il subisse, de plein fouet depuis trois ans, les soubresauts du conflit syrien. Mais aujourd'hui, Beyrouth ne peut plus faire face tout seul à une triple crise : économique, humanitaire et sécuritaire.

En plus des difficultés causées par la présence de près d’un million de réfugiés syriens pour un pays qui compte quatre millions d’habitants (soit l’équivalent, à l’échelle de la France, d’un afflux de 17 millions de réfugiés), le Liban est en proie à une vague d’attentats à la voiture piégée et d'attentats-suicide, qui ont provoqué la mort d'une cinquantaine de personnes. Le pays du Cèdre vit aussi dans une grave instabilité sécuritaire, sur fond de tensions confessionnelles ravivées par la crise syrienne. "Si 2013 a été une année particulièrement violente, 2014 sera l’année de tous les dangers, car tous les voyants sont au rouge et la tension communautaire est très forte. Le Liban risque de vivre le scénario catastrophique d’une irakisation du pays", explique à FRANCE 24 Ziad Majed*, politologue libanais et professeur de sciences politiques à l'Université Américaine de Paris.

Cette instabilité sécuritaire a de très fortes répercussions sur une économie libanaise chancelante. La croissance, qui s’élevait à 8 % en moyenne entre 2007 et 2010, a chuté à seulement 2 % en moyenne depuis 2011. En outre, le chiffre d’affaire du secteur touristique, un des atouts majeurs de l’économie libanaise, a été sévèrement touché depuis le début de la crise syrienne, passant de 20 % du produit intérieur brut en 2009-2010 à 8 % aujourd’hui.

Redresser l’économie et équiper l’armée

"Même s’il n’est pas encore question de faillite, le Liban, qui fait face à une grave crise économique et financière depuis quelques années, a grandement besoin d’une aide internationale car il ne pas peut assumer seul le soutien aux réfugiés syriens, dont une grande partie est accueillie dans des conditions difficiles, dans des régions pauvres du pays qui sont elles-mêmes en grande difficulté", souligne Ziad Majed.

Mais ce n’est pas tout : une quatrième crise - politique cette fois - pourrait rapidement venir s'y greffer. Un scénario probable si le gouvernement fraîchement composé, après 10 mois de blocage, ne parvenait pas à s’accorder sur une feuille de route, et si aucune entente n'était trouvée sur l’identité du prochain président de la République, dont l’élection par le Parlement est prévue à la mi-mai.

C’est dans ce contexte que le groupe des Amis du Liban, créé en septembre dernier, va se pencher sur les modalités et l’organisation d’une assistance humanitaire pour l’accueil des réfugiés syriens, financé par des pays donateurs. Il sera aussi question d'un soutien économique par l'intermédiaire d'un fonds créé par la Banque mondiale pour aider Beyrouth à contrecarrer la crise économique. Le groupe abordera également le sujet d'un soutien à l’armée libanaise afin de maintenir l'ordre sécuritaire dans le pays et à ses frontières.

Au cœur de ce dernier point, se trouvera l’aide franco-saoudienne accordée au Liban, notamment la question de la livraison des armes françaises achetées à hauteur de 2,2 milliards d'euros par Ryad au profit de l'armée libanaise. Autant de dossiers clés, que le Liban espère pouvoir régler pour redresser son économie et éviter de sombrer dans la violence qui frappe à sa porte.

* Ziad Majed est l’auteur d’un livre à paraître le 4 avril aux éditions Actes Sud, intitulé "Syrie, la révolution orpheline".