Depuis le début des JO, les Canadiens originaires du Québec ont récolté une belle moisson de médailles. Selon un palmarès virtuel, la province figurerait parmi les meilleures nations, si elle était indépendante.
Deux sœurs main dans la main sur un même podium olympique. Les images du sacre de Justine et Chloé Dufour-Lapointe ont fait le tour du monde. En décrochant l’or et l’argent dans l’épreuve de ski de bosses le samedi 8 février, ces deux Canadiennes sont devenues le symbole de tout un pays. Et au Québec où elles sont nées, les médias n’ont pas manqué de souligner leurs origines.
Deux jours plus tard, ce sont d’autres Québécois de la délégation canadienne qui ont également fait une razzia olympique. Alexandre Bilodeau et Mikael Kingsbury ont réalisé le doublé dans l’épreuve masculine de ski de bosses, tandis que Charles Hamelin a décroché l’or en short-track (1500 m). Au total, depuis le début des Jeux olympiques, le Québec a remporté six des dix médailles de l’équipe du Canada. Si cette province était indépendante, elle figurerait même à la sixième place du classement des pays, juste devant la Suisse, à la date du 13 février. À Vancouver déjà en 2010, huit des 15 médailles individuelles avaient été gagnées par des Québécois.
Une récupération politique
Ce succès sportif de cette région francophone du Canada n’a pas tardé à être récupéré sur les réseaux sociaux, notamment par les souverainistes. Le palmarès virtuel plaçant le Québec parmi les meilleures nations olympiques a été relayé sur Facebook par le ministre du Tourisme Pascal Bérubé, membre du Parti québécois. Un photomontage montrant les sœurs Dufour-Lapointe portant des gants avec des fleurs de Lys, plutôt que des feuilles d’érable a également été retweeté par le ministre de l’Enseignement supérieur, Pierre Duchesne. Interrogé à ce sujet, ce dernier a expliqué que ce n’était pas un outrage. "Je pense que c’est une bonne façon aussi de rappeler comment ces deux filles ont posé des gestes qui font la fierté de tous, au premier titre des Québécois", a-t-il déclaré dans le "Journal de Québec".
Au-delà de cette récupération politique, les médias canadiens ont essayé de comprendre cette domination des athlètes québécois. Pour "Globe and Mail", cette réussite s’explique en partie par l’influence d’anciens sportifs : "Les sœurs Dufour-Lapointe suivent les traces de Jean-Luc Brassard (champion olympique, en bosses à Lillehammer en 1994, NDLR). L’équipe de patinage de vitesse sur courte piste a aussi été inspirée par Gaëtan Boucher (quadruple médaillé olympique)". Ce journal anglophone souligne aussi que "la majorité de la population du Québec vit à moins d’une heure de route de montagnes et de forêts enneigées avec des sentiers d’hiver".
TVA Sports note également que le "Québec récolte ce qu’il a semé". Selon ce site sportif, les autorités de la province ont particulièrement investi dans le sport : "Depuis 2003, l’État québécois verse bon an mal an près de 22 millions de dollars pour encourager les efforts des athlètes et de leurs entraîneurs, ceci sans parler des autres millions qui sont versés pour accueillir des événements sportifs internationaux et la mise en place d’infrastructures".
De leur côté, les athlètes québécois préfèrent rester loin de ce débat. Sur leur page Facebook, les sœurs Dufour-Lapointe ne mettent pas du tout en avant le Québec et encouragent toute l’équipe nationale : "Go Go Go les Canadiens !". Questionné par un journaliste anglais sur sa province natale après sa victoire olympique, Alexandre Bilodeau a aussi préféré botter en touche :"Mikaël Kingsbury (médaillé d’argent, NDLR) et moi sommes fiers d’être Québécois. Mais nous sommes également fiers d’être Canadiens… Oui, nous faisons beaucoup de bonnes choses au Québec, mais il y en a tout autant à travers le Canada".