Yilmaz, un ancien soldat de l'armée des Pays-Bas est parti combattre avec les djihadistes en Syrie il y a deux ans. Dans un reportage télévisé diffusé le 26 janvier, il a confié être venu pour "défendre le peuple syrien".
Sur le champ de bataille syrien, Yilmaz est un djihadiste un peu particulier qui porte un signe particulier. Ce Néerlandais d’origine turque se bat en effet depuis 2012 contre les forces du régime de Bachar al-Assad, vêtu de son ancien uniforme de l'armée royale des Pays-Bas.
Il y a huit mois, c’est précisément ce détail qui a attiré l’attention de Roozbeh Kaboly, un journaliste néerlandais du magazine “Nieuwsuur,” diffusé le 26 janvier sur NOS/NTR, la télévision nationale de son pays. Ce dernier était alors à la recherche de compatriotes partis faire le djihad en Syrie, sachant que selon les services de renseignements néerlandais, ils seraient au nombre de 120.
C’est en surfant sur le réseau social Instagram qu’il repère Yilmaz, qui mettait en scène sa vie de djihadiste et parvient à entrer en contact avec lui. Depuis la fermeture de son compte Instagram, l’ancien militaire s’affiche désormais sur Tumblr, où il publie en vrac des photos de combats, d’armes et d’enfants syriens, ainsi que de la propagande djihadiste, et notamment des discours haineux à l’égard des chiites.
"Défendre le peuple syrien"
Après avoir dissipé l’appréhension et la méfiance de l’islamiste au crâne rasé et à la barbe touffue, en discutant avec lui quasi-quotidiennement, le journaliste a réussi à convaincre l’ancien soldat professionnel de témoigner sur son engagement et ses motivations.
Soucieux "de corriger l’image [véhiculée par les médias, NDLR] des djihadistes qui ne sont pas tous dangereux et alliés à Al-Qaïda", Yilmaz accepte d’être interviewé et filmé par un intermédiaire syrien mandaté par la chaîne NOS/NTR. Même si à aucun moment il n’est précisé dans quel groupe se bat le jeune Néerlandais, le reportage est riche en enseignements. Et ce, précisément à l’heure où les Européens s’inquiètent et s’interrogent sur le cas de ces centaines de djihadistes nés sur leur sol et qui se battent en Syrie.
"Même si je sais que ça peut être difficile à entendre, la plupart des frères qui sont venus jusqu’ici, dont moi-même, nous sommes venus pour mourir", explique dans le reportage Yilmaz, qui est notamment filmé pendant qu’il forme, fort de ses compétences militaires, des combattants au tir. "Je suis venu en Syrie uniquement pour la Syrie, je ne suis pas venu pour apprendre à fabriquer des bombes ou ce genre de chose pour ensuite rentrer", balayant ainsi d’un revers de la main les craintes des Occidentaux de voir ces djihadistes aguerris rentrer dans leurs pays d’origine et passer à l’action. "Si les forces néerlandaises avaient envoyé une unité ou des combattants pour aider le peuple syrien, j'aurais été le premier à signer, mais personne ne fait rien", développe-t-il.
Il ajoute que comme lui, beaucoup de djihadistes sont venus en Syrie "pour les bonnes raisons", c'est-à-dire "pour défendre le peuple syrien". Et de poursuivre : "vous ne pouvez pas rester assis à la maison et regarder des centaines et des milliers de personnes se faire massacrer".
Créer un État islamique
Lorsqu’il est interrogé sur son éventuelle appartenance à la nébuleuse Al-Qaïda, Yilmaz répond que "les frères d’Al-Qaïda, sont là, ils combattent, tout le monde le sait, mais le fait que je sois là en Syrie ne signifie pas que par définition je suis membre d’Al-Qaïda". L’ancien militaire rejette l’association entre djihadisme et Al-Qaïda, qu’il considère comme un cliché nourri par les médias, de même que les raccourcis suivant lesquels, "si quelqu’un vient en Syrie, c’est parce qu’il est radicalisé, ou perturbé, etc.".
Toutefois, Yilmaz affirme que l’un des objectifs des djihadistes est de créer un État islamique en Syrie. "Seul un État islamique, édifié sur les principes islamiques, défendra toujours les innocents et la population qui vivent à l’intérieur de ses frontières, c’est ce que nous voulons".
En guise de conclusion, le jeune néerlandais choisit de répondre avec humour au journaliste qui lui demande ce qu’il a à répondre à ceux qui craignent son retour aux Pays-Bas. "Si, au grand jamais je rentre, j’irai manger des plats de fastfood turcs et des sushis, je boirai du Dr Pepper, et j’irai faire un câlin à ma mère et je resterai en famille ", conclut-il.
Le reportage diffusé par la télévision nationale néerlandaise (sous-titré en anglais)