
Les ultranationalistes de "Praviy Sektor" sont en première ligne sur les barricades de Kiev, où le mouvement de protestation contre le président Viktor Ianoukovitch a basculé dans la violence ces derniers jours. Reportage.
Jets de pavés, lancers de cocktails Molotov, charges contre les forces anti-émeute : le mouvement de protestation contre le président ukrainien Viktor Ianoukovitch s'est sensiblement radicalisé depuis la semaine dernière, donnant lieu à des scènes de guérilla urbaine quasi-inédites à Kiev, qui ont déjà fait au moins trois morts.
Parmi les opposants les plus radicaux, la coalition ultranationaliste "Praviy Sektor" (Secteur Droit en ukrainien). Peu connue jusqu'à ces derniers jours, elle joue désormais un rôle prépondérant dans les actions les plus violentes. Liée aux supporteurs de football, elle est en première ligne sur les barricades du centre-ville de Kiev
"Nous n'avons jamais été pacifiques"
"L'accord avec l'Union européenne [l’opposition a fait du rapprochement avec l'UE une de ses principales revendications, NDLR] est pour nous une question secondaire. L'important c'est de dégager ce régime d'occupation interne, comme on l'appelle, ce régime mafieux, et nous sommes persuadés que seule une révolution nationaliste le permettra", explique à FRANCE 24 Andriy Tarasenko, porte-parole de Praviy Sektor.
Et si l'opposition démocratique arrive un jour au pouvoir, il n’est pas question pour ce groupuscule, qui veut débarrasser l’Ukraine de toute influence russe, de gouverner à ses côtés. "Nous n'avons jamais été pacifiques, nous n'avons jamais été au Parlement, et nous ne le serons jamais", souligne Andriy Tarasenko.
Pourtant, si certains dans l’opposition craignent que le choix de la violence ne fournisse au pouvoir des arguments pour accentuer la répression, d’autres voient d'un œil bienveillant la présence de ces alliés de circonstance à leurs côtés. Depuis le vote des lois répressives et la mort de plusieurs manifestants, la tension est à son comble et tous les moyens semblent bons pour déloger le président Ianoukovitch.
"Ils maintiennent la pression sur la police qui a provoqué la terreur et utilise la violence contre des manifestants pacifiques, justifie l’opposante Lesya Orobets, député de Batkivchtchina. Les gens sont désespérés et nous devons reconnaître le droit des manifestants à porter et utiliser des armes".
"Praviy Sektor" fait des émules
Les groupuscules d'extrême droite, très actifs sur les réseaux sociaux, attirent de plus en plus de contestataires qui se joignent à eux. "Le noyau violent du mouvement de protestation mélange des personnes très différentes, explique Andreas Umland, chercheur spécialiste de l'extrême droite en Europe de l'Est. Il y a effectivement des extrémistes, mais aussi des manifestants frustrés, des activistes d'extrême gauche".
De leurs côtés, les autorités ukrainiennes ont dénoncé les violences commises par les nationalistes radicaux présents dans les rangs de l'opposition. Un responsable du ministère de l'Intérieur, cité par l’AFP, a estimé qu'au moins 500 sympathisants de Praviy Sektor vivaient dans les bâtiments publics du centre de Kiev occupés par les manifestants.