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Hollande exprime ses "regrets pour l'interprétation de ses propos" sur l'Algérie

Vertement critiqué pour une plaisanterie sur l’insécurité en Algérie, le président français a fait savoir qu’il regrettait "l'interprétation" qui avait été faite de ses propos. En France, l’opposition dénonce un "dérapage".

"Chacun connaît les sentiments d’amitié que François Hollande porte à l’Algérie et le grand respect qu'il a pour son peuple." C’est par un communiqué de l’Élysée que le président français s’est employé, dimanche 22 décembre, à désamorcer la polémique suscitée par sa boutade sur l’insécurité en Algérie.

Le chef de l’État "exprime ses sincères regrets pour l’interprétation qui est faite de ses propos et en fera directement part au président Bouteflika", ajoute le communiqué.

Le 16 décembre, devant le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), qui fêtait ses 70 ans, le président français avait déclaré sur le ton de la plaisanterie que le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, était rentré d'Algérie "sain et sauf". Avant d’ajouter : "C'est déjà beaucoup".

D'abord passée inaperçue, la boutade de François Hollande a été relayée sur les réseaux sociaux et a indigné la presse algérienne. Dans la presse locale, la déclaration maladroite du chef de l’État français a fait, samedi, la une des journaux arabophones "El-Khabar", "Echorouk" ou encore "Ennahar", dans lequel on pouvait lire "Hollande se moque de l'Algérie devant les juifs".

"Incident regrettable"

Samedi, le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a pour sa part estimé que ces propos constituaient un "incident regrettable". "Il est clair qu'il s'agit d'une moins-value par rapport à l'esprit qui enveloppe nos relations et à la réalité de ce que les délégations françaises, et même autres, peuvent constater de la situation sécuritaire en Algérie", a déclaré le chef de la diplomatie algérienne lors d'une conférence de presse avec son homologue chinois, Wang Yi.

"Nous avions terminé l'année 2012 sur le succès éclatant de la visite d'État de M. François Hollande en Algérie. L'année 2013 n'est pas encore terminée, nous ne souhaitons pas la terminer sur une mauvaise note, et nous souhaitons donc pouvoir trouver dans les jours qui nous séparent de la fin de l'année un moyen de tourner la page de cet incident regrettable", a-t-il également affirmé. Sans doute était-ce le sens du communiqué de l'Élysée, dont le ton sonne comme des excuses.

"Nausée"

En France, la saillie présidentielle a également provoqué des remous. Sur Twitter, le co-président du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon, s’est emporté : "L'ivresse communautariste du dîner a grisé #Hollande. Mais c'est nous qui avons la nausée".

Le patron de l’UMP (opposition), Jean-François Copé, a quant à lui regretté "le dérapage verbal" du chef de l’État. Plus virulente, Salima Saa, conseillère politique de l’UMP, a tweeté : "L'incapacité de François Hollande à contrôler ses ‘petites blagues’ est consternante. Elle fait de lui un chef d'État inconscient".

Chassez le naturel…

Ce n’est pas la première fois que l’opposition s’offusque des plaisanteries de l’actuel locataire de l’Élysée. Alors candidat à la présidence, François Hollande avait décidé de brider son penchant pour les bons mots afin de ne pas gêner sa campagne. Aujourd’hui à la tête de l’État, l’ancien patron du Parti socialiste cède parfois à la facétie. Chassez le naturel, il revient au galop...

En février dernier, lors du Salon de l'agriculture, à un enfant qui lui faisait remarquer qu’il n'avait "jamais vu Nicolas Sarkozy", le président de la République avait répondu : "Ah, bah tu ne le verras plus !" Une sortie qui, au sein de l’UMP, avait irrité les plus fervents partisans d’un retour de l’ancien président aux affaires.

Même lorsque François Hollande pratique l’auto-dérision, il se heurte aux critiques. Qu’il s’agisse de l’affaire Cahuzac (le président avait souligné que depuis son départ, le gouvernement comptait plus de femmes que d’hommes) ou de son impopularité ("On ne cherche pas à être impopulaire. Ce n'était donc pas un objectif que je m'étais fixé" avait-il plaisanté en mai, lors sa deuxième grande conférence de presse de son quinquennat), le président est connu pour pratiquer l’humour afin de désamorcer les crises. Une décontraction qui, pour ses opposants, est loin de lui conférer la hauteur digne d’un chef d’État.

Avec AFP