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Prothèses frauduleuses : le fondateur de PIP condamné à quatre ans de prison

Le tribunal correctionnel de Marseille a rendu, mardi matin, son jugement dans le procès retentissant des implants mammaires frauduleux PIP. Cinq ex-cadres et dirigeants de l'usine varoise, dont le fondateur Jean-Claude Mas, ont été condamnés.

Le fondateur de la société varoise Poly Implant Prothèse (PIP), Jean-Claude Mas, 74 ans, a été condamné mardi 10 décembre à quatre ans de prison et 75 000 euros d’amende par le tribunal correctionnel de Marseille. La commercialisation, pendant des années, de ses prothèses frelatées ont touché potentiellement 300 000 femmes à travers le monde.

Affublé de baskets blanches et d’une veste à carreaux, "l'apprenti sorcier des prothèses", selon l’expression du procureur, est resté imperturbable à l'énoncé du jugement. En plus de la sentence de prison et de l’amende, il est désormais sous le coup d’une interdiction définitive d'exercer dans le secteur médical ou de gérer une entreprise.

Une cinquantaine de victimes étaient présentes dans la salle parmi les 7 113 parties civiles, un chiffre revu à la baisse par rapport aux 7 445 annoncées lors du procès en mai, certaines plaintes n'ayant pas été jugées recevables.

Quatre co-prévenus également condamnés

Quatre autres ex-cadres de l'entreprise, poursuivis pour des faits présumés de tromperie aggravée commis entre le 1er avril 2001 et le 29 mars 2010, comparaissaient en même temps que Jean-Claude Mas. Parmi eux, l'ancien président du directoire, Claude Couty, écope de trois ans de prison, dont deux avec sursis, et 30 000 euros d'amende. Hannelore Font, directrice de la qualité, et Loïc Gossart, en charge de la production, sont eux condamnés à deux ans de prison dont un avec sursis. Enfin le responsable de la R&D Thierry Brinon à 18 mois avec sursis. Les trois derniers étaient poursuivis comme complices.

Tous ont reconnu la fraude, révélée en mars 2010, sur le gel de silicone des implants utilisé par PIP, déclaré officiellement comme étant du Nusil mais étant enréalité bien différent. Une tromperie qui a permis à l'entreprise un gain annuel de un million d'euros.

Jean-Claude Mas, qui a tenté d'effacer son image d'homme autoritaire en présentant des excuses aux victimes, a persisté à nier la nocivité de ce gel. Ses coprévenus, à l'exception d'un seul, ont dit en ignorer les risques.

Le procès n'a pas permis de trancher cette question centrale de la dangerosité du produit, les études étant plutôt rassurantes, malgré un taux de rupture et de "transsudation" des prothèses supérieur à la normale.

Plus de 7 000 ruptures et 3 000 effets indésirables

Le dernier bilan de l'Agence des produits de santé (ANSM) fait ainsi état de plus de 7 500 ruptures et 3 000 effets indésirables, principalement des "réactions inflammatoires", pour un nombre de porteuses estimé à 30 000 en France et plusieurs centaines de milliers dans le monde.

Dans l'entreprise, les 120 salariés savaient et n'ont rien dit, aidant même à contourner les contrôles. Une absence de "sursaut citoyen" que les employés, prévenus ou témoins, ont mis sur le compte de la peur du patron autoritaire qu'était Jean-Claude Mas, la "routine" et la difficulté à dénoncer un système eu égard aux emplois en jeu.

À l’inaction collective, s'ajoutent l'inefficacité des inspections du géant allemand TÜV et l'alerte tardive de l'ANSM, tous deux parties civiles au grand dam des plaignantes, en quête d'une indemnisation face à des prévenus insolvables.

Dans une procédure civile parallèle, elles ont d’ailleurs remporté une première victoire : le tribunal de commerce de Toulon a jugé mi-novembre le leader du contrôle qualité responsable, estimant qu'il avait "manqué à ses obligations de contrôle", et l'a condamné à "réparer les préjudices" causés. TÜV a fait appel de cette décision.

Avec AFP et REUTERS