envoyée spéciale en Afrique du Sud – À Sinoville, quartier huppé de Pretoria où vivent majoritairement des familles blanches, Nelson Mandela est unanimement salué comme une "icône" et "une source d'inspiration". Pour ces Sud-Africains, son héritage restera.
C'est un quartier qui détonne avec le bruyant centre ville de Pretoria. À Montana, dans le nord de la capitale, et plus précisément à Sinoville, un petit quartier de maisons résidentielles huppées, seuls les chiens - qui aboient lorsque l'on s'approche trop près des portails - viennent briser le silence. Ici, pas une maison n'a fait l'impasse sur l'installation d'alarme, de grillages aux portes et aux fenêtres, et sur l'acquisition d'un gros canidé.
Pourtant, d'aucuns réfutent l'accusation de "surprotection" ou de "paranoïa". "On sait très bien que des rumeurs disent que l'on a peur. Que l'on redoute l'après-Mandela", explique Donovan, un businessman de 49 ans installé à Montana avec sa femme et ses deux filles. "Mais c'est faux, et personne ici ne dira du mal de lui", affirme-t-il, un cigare à la main.
Pour Donovan, comme pour son voisin Tonie, un jeune étudiant de 19 ans, l'ancien président sud-africain est en effet une "icône" intouchable. "C'est une source d'inspiration pour nous les Blancs. Mandela nous a appris l'égalité des peuples et tout ça dans la non-violence", confie le jeune garçon en descendant de sa Rover.
Mauvais procès anti-Mandela
Même son de cloche chez Hennie et Debbie Roets, un couple d'une cinquantaine d'années, installé depuis 3 ans à Sinoville. Tous deux remercient Madiba de leur avoir évité le pire : la guerre civile.
"Mandela est un grand homme, nous le respectons tous. Grâce à lui, nous sommes en vie, personne n'a jamais voulu se venger. Personne ne nous a jamais menacés parce que nous étions blancs. Et ça, c'est grâce à lui, je lui dois ma vie heureuse et paisible", confie Debbie, entourée de ses quatre labradors. "Ici, vous ne trouverez pas un Blanc qui ne l'admire pas, ni un Noir d'ailleurs", lance-t-elle en souriant, quand son jardinier, noir, passe le pas de la porte d'entrée.
Tous affirment être agacés par ce mauvais procès anti-Mandela que leur intentent certains Sud-Africains. "Ce n'est pas parce que nous ne descendons pas dans la rue en chantant et en priant que nous ne le respectons pas, se justifie Tonie. C'est juste une question de tradition culturelle, je préfère prier pour lui avant d'aller me coucher que de rester des heures entières devant l'hôpital à chanter. Il n'y a rien d'irrespectueux là-dedans !"
Le plus important, selon Donovan, reste l'héritage de Nelson Mandela. "Certes, quand il ne sera plus là, certaines choses changeront", affirme-t-il. Mais le risque, selon lui, est essentiellement politique. "Peut-être que l'aile dure de l'ANC pourrait faire n'importe quoi, renforcer ses pouvoirs.. Je ne sais pas… Peut-être que la corruption va s'amplifier, précise-t-il. Mais quoi qu'il se passe, je crois en mon pays, il est solide, et rien ne le fera basculer dans la violence encore une fois."