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En Égypte, le droit de manifester remis en cause par une loi

Le président égyptien par intérim, Adly Mansour, a promulgué dimanche une loi imposant des mesures draconiennes autour du droit de manifester. Le texte autorise, entre autres, les forces de l’ordre à recourir à la force si nécessaire.

C’est une loi qui, à peine promulguée, est déjà très controversée au sein de la société égyptienne. Le président par intérim Adly Mansour a donné son feu vert, dimanche 24 novembre, à l’application d’un texte imposant des conditions draconiennes aux manifestants égyptiens. 

Depuis plusieurs semaines déjà, une grande partie de la société égyptienne s’inquiétait de ce projet de loi leur imposant d'informer la police avant de manifester, de fournir l’identité des organisateurs, et de dévoiler le trajet emprunté. Le texte en vigueur donne également carte blanche au ministre de l’Intérieur pour décaler ou interdire un rassemblement, et surtout, disperser par la force les manifestants si nécessaire.

Plusieurs ONG de défense des droits de l'Homme, de même que l'ONU, avaient récemment appelé Le Caire à abandonner ce projet de loi, accusant le gouvernement de revenir sur les acquis de la révolution populaire de 2011, qui a contraint Hosni Moubarak à abandonner le pouvoir après trois décennies de règne absolu.

Mais le gouvernement a fait la sourde oreille préférant jouer la carte de la pédagogie, arguant que le texte est simplement mal interprété. Interrogé dimanche par l'AFP, le Premier ministre Hazem Beblawi a précisé que l'État n'attendait pas des organisateurs qu'ils "demandent l'autorisation" des autorités avant de manifester, mais qu'"ils les en informent [...]. Cette loi ne restreint pas le droit de manifester, mais vise à protéger les droits des manifestants", a-t-il ajouté.

Malgré tout, le message passe mal. Pour beaucoup, cette loi signe le retour au régime sécuritaire de l’ère Moubarak et représente donc une menace pour la société civile. "Cette loi […] assimile les manifestants pacifiques à des criminels, et donne aux forces de sécurité de nouveaux pouvoirs pour les écraser", estimait Amnesty International dans un communiqué du 22 octobre 2013.

De nombreux experts estiment que cette loi vise surtout à mieux resserrer l’étau autour des Frères musulmans, dont les membres réclament le retour du président déchu Mohamed Morsi, issu de la confrérie. Le 14 août, le gouvernement avait lancé une vague de répression extrêmement sanglante à l’égard des Frères musulmans. Plus d'un millier d'entre eux ont été tués depuis, et plus de 2 000 membres de la confrérie arrêtés. Dimanche, des cortèges pro-Morsi défilaient dans différentes villes du pays, les islamistes continuant à appeler presque chaque jour à la mobilisation.

Avec dépêches AFP