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Centrafrique : le chef rebelle Kony est-il prêt à la reddition ?

Les autorités centrafricaines réaffirment négocier avec le chef rebelle ougandais Joseph Kony, recherché par la CPI. Ces informations, jugées peu crédibles par Washington et l’ONU, risquent néanmoins de relancer la chasse à l’homme.

Où se cache le criminel de guerre ougandais Joseph Kony ? La question divise les experts américains et les nouvelles autorités centrafricaines, qui affirmaient, vendredi 22 novembre, être en train de "négocier" avec le leader de la tristement célèbre Armée de résistance du seigneur (LRA). La présence en Centrafrique de ce seigneur de guerre, recherché par la justice internationale pour crimes contre l’humanité, avait été évoquée quelques jours plus tôt par le chef de l’État centrafricain Michel Djotodia.

Le chaos en Centrafrique : une aubaine pour les groupes extrémistes

La réapparition de la LRA en Centrafrique compliquerait la situation déjà chaotique de ce pays d’Afrique centrale, où des bandes armées sèment la destruction impunément depuis le renversement de l’ancien président Michel Bozizé en mars dernier.

La multiplication d’affrontements meurtriers entre milices d’autodéfense chrétienne et anciens rebelles musulmans évoque une situation "pré-génocidaire", tandis que divers groupes djihadistes profiteraient du désordre pour s'implanter dans le pays.

"Joseph Kony veut sortir de la clandestinité. Nous sommes en train de négocier avec lui. Il a demandé à être fourni en nourriture, le gouvernement s'est occupé de cela", a déclaré Djotodia, jeudi à Bangui. Son porte-parole a ensuite précisé à RFI que des émissaires du président centrafricain avaient rencontré le chef de la LRA à Nzako, dans la préfecture du Mbomou, dans l’est de la Centrafrique. "Joseph Kony est disposé à renoncer au combat, mais à aucun moment il n’a parlé de reddition" a ajouté Guy Simplice Kodégué, le porte-parole de la présidence centrafricaine à nos confrères de RFI.

Doutes américains

Mais un officiel américain à Washington a estimé que ces informations n’étaient pas "crédibles". Sous couvert d’anonymat, ce haut responsable a indiqué, jeudi à l’AFP, que seulement 12 à 13 combattants, ainsi que quelques membres de la famille de Kony, seraient actuellement en pourparlers avec Bangui. Selon le journal "Jeune Afrique", la trace de Joseph Kony a été perdue en mars dernier et les négociations avec Bangui ont été entamées par une section de la LRA dirigée par un ancien garde du corps du seigneur de guerre ougandais.

Les États-Unis restent mobilisés dans la traque de Joseph Kony. Washington a promis cinq millions de dollars de récompense pour la capture de l’homme qui serait responsable de la mort de plus de 100 000 personnes dans la région depuis l’apparition de la LRA en 1987. La diffusion, en 2012, d’une campagne internet anti-Kony, par l’ONG américaine Invisible Children, a rappelé à l’opinion publique les nombreuses exactions commises par la LRA – meurtres, viols, recrutements massifs d’enfants soldats... Des exactions qui ont valu au chef rebelle ougandais et à quatre de ses associés d’être visés par le premier mandat d’arrestation jamais délivré par la Cour pénale internationale, en 2005.

Chasse à l’homme

Les déclarations de Bangui sur la réapparition de Joseph Kony en Centrafrique vont sans doute relancer la chasse à l’homme menée depuis 2008 par 3 000 soldats de l’Union africaine et 100 "conseillers" de l’armée américaine. Malgré cette traque ininterrompue et la fonte de ses effectifs – la LRA ne regrouperait plus qu’environ 500 hommes d’après l’ONU – le criminel de guerre ougandais reste insaisissable.

Ces 26 ans de clandestinité ont même incité un aventurier canadien à se tourner vers le financement collectif sur internet pour monter une expédition privée visant à traquer le chef de guerre ougandais. Robert Young Pelton, réputé notamment pour ses documentaires en Afghanistan et en Somalie, a demandé aux internautes la bagatelle de 450 000 dollars pour lui permettre de réussir là où les forces spéciales américaines ont échoué. Un appel qui peine visiblement à séduire les internautes : à un mois de la fin de la collecte sur Indiegogo, la barre des 10 000 dollars n’a toujours pas été franchie.