La banque américaine JP Morgan a accepté de payer une somme record de 13 milliards de dollars pour régler une partie de ses différends avec les autorités américaines. Un arrangement qui ne constitue qu'une facette de l'histoire.
13 milliards de dollars. Jamais dans l’histoire américaine, une banque n’avait accepté de payer une telle somme aux autorités pour mettre un terme à des poursuites judiciaires. C’est pourtant ce que JP Morgan va verser au ministère américain de la Justice et à plusieurs autorités de régulation pour effacer l’ardoise d’une partie des poursuites dont elle fait l’objet.
“C’est un signal clair qu’aucune banque, qu’aucune société, aussi profitable soit-elle, n’est au-dessus des lois”, s’est félicité, mardi 19 novembre, Éric Holder, le procureur général des États-Unis. L’accord trouvé couvre l’intégralité des poursuites civiles engagées contre la banque, accusée d'être une des responsables de la crise des subprimes de 2008.
De son côté, Jamie Dimon, le PDG de JP Morgan, s’est déclaré “heureux d’avoir réussi à trouver un accord”. Les négociations, comme le relate le "Washington Post", ont duré plusieurs semaines et ont failli, à plusieurs reprises, échouer. La banque américaine avait, à l’origine, proposé de ne payer que trois milliards de dollars pour solder les comptes.
Mais cette somme de 13 milliards, trois fois plus élevée que le précédent record détenu par BP (4 milliards de dollars versés en novembre 2012 pour mettre fin aux poursuites relatives à la marée noire dans le Golfe du Mexique), n’est qu’une partie de l’histoire. Revue de détails des enseignements de cet accord historique.
JP Morgan n’en a pas fini avec la justice. Treize milliards de dollars c’est beaucoup, mais la banque risque de devoir payer encore plus. En effet, l’accord conclu mardi 19 novembre ne couvre pas tout l’aspect criminel. Des enquêtes ont ainsi été lancées par le ministère de la Justice, qui accuse plusieurs dirigeants de JP Morgan de fraude dans le cadre du scandale des subprimes et de manipulations des cours des marchés de l’énergie. Les autorités américaines s’intéressent également aux recrutements de la banque en Chine, soupçonnée d’avoir engagé les enfants de dignitaires du régime pour avoir accès à certains marchés publics.
JP Morgan ne paie pas que pour JP Morgan. Une partie de la somme que JP Morgan a accepté de verser à l’État couvre en fait les agissements des banques Washington Mutual et Bear Stearns avant l’éclatement de la crise financière. Pourquoi ? Parce que JP Morgan a racheté ces deux institutions financières et a hérité, au passage, de leurs casseroles judiciaires. “Si c’était à refaire, nous n’acheterions pas Bear Stearns de nouveau”, a reconnu Jamie Dimon.
JP Morgan dit merci aux déductions d'impôts. Une partie de l’argent versé au gouvernement américain est, en effet, déductible des impôts. À l’heure actuelle, personne ne sait précisement combien cet accord va réellement coûter à JP Morgan. Au moins 7 milliards de dollars peuvent être déduits du revenu imposable, a concédé lors d’une conférence téléphonique Marianne Lake, responsable juridique de la banque.
“La banque pourrait ainsi économiser environ 2,2 milliards de dollars en se fondant sur son taux d’imposition”, juge le "Wall Street Journal". Un imbriglio fiscal qui crée des remous aux États-Unis, où ces économies d’impôts sont perçus comme un moyen pour JP Morgan de priver l'État et donc les contribuables d'une coquette somme.
JP Morgan ne reconnaît pas avoir enfreint la loi. On pourrait croire que le versement d’une telle somme signifie que JP Morgan reconnaît avoir agi illégalement. Que nenni. La banque insiste bien sur le fait qu’elle “n’admet pas avoir violé une quelconque loi”. Elle se contente de reconnaître les faits qui lui sont reprochés, comme de ne pas avoir informé suffisamment les investisseurs des risques que comportaient des produits financiers de type subprimes.