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Évasion de Francis Collomp : "C’est la première fois qu’un otage d’Ansaru s’en sort"

Au lendemain de l’évasion de l’otage français Francis Collomp, détenu depuis 11 mois par le groupe islamiste Ansaru au Nigeria, les questions se multiplient autour des liens qui unissent l’organisation terroriste à la secte Boko Haram. Décryptage.

"C’est la première fois qu’un otage d’Ansaru s’en sort vivant et parvient à s’échapper", a expliqué dimanche 17 novembre Marc-Antoine Pérouse de Montclos, chercheur à l'Institut de recherche pour le développement (IRD), sur FRANCE 24, commentant la spectaculaire évasion de l’ex-otage français Francis Collomp, survenue quelques heures plus tôt au Nigeria. Une situation exceptionnelle qui soulève de nombreuses questions sur l’identité et les intentions du groupe islamiste.

Apparu en juin 2012, Ansaru se présente sous le nom de Jamaatu Ansarul Muslimina Fi Biladis Sudan, ce qui signifie, en arabe, "l'Avant-garde pour la protection des musulmans en Afrique noire". Il s’agit d’une organisation islamiste et djihadiste dissidente de Boko Haram, elle-même créée en 2003 et qui sévit aussi dans le nord du Nigeria.

Ansaru, une ambition internationale

Au moment de sa création, Ansaru est apparu dans sa rhétorique moins extrémiste que Boko Haram, mais le groupe s’est rapidement radicalisé. "Ansaru est aujourd’hui

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Ansaru, une faction dissidente de la secte islamiste boko haram
Évasion de Francis Collomp : "C’est la première fois qu’un otage d’Ansaru s’en sort"

beaucoup plus dur sur le plan idéologique, plus proche d’Al-Qaïda que ne l’est Boko Haram, assure le politologue. Sa mission est de ‘chasser les croisés de la Terre d’Islam’".

Les membres d’Ansaru ont d’ailleurs déclaré, en mars 2013, avoir exécuté sept otages (de nationalité libanaise, syrienne, grecque, italienne et britannique) de la société de construction libanaise Setraco, à l’issue de la plus importante prise d'otages jamais réalisée dans le nord du Nigeria. "Alors que tous les expatriés détenus par Boko Haram ont toujours été libérés vivants", souligne le spécialiste des questions terroristes en Afrique.

Ansaru se différencie également de Boko Haram par la portée internationale qu’il donne à son mouvement. Alors que Boko Haram limite son action au Nigeria, Ansaru prône l’application de la charia dans le nord du Nigeria et dans toute l’Afrique.

Des liens étroits entre organisations terroristes

Malgré ces différences notoires, Boko Haram et "sa petite sœur" entretiennent toujours des liens. Les responsables de l’organisation mère ont d’ailleurs reconnu que l’enlèvement du prêtre Georges Vandenbeusch, kidnappé dans la nuit du 13 au 14 novembre, avait été "coordonné" avec Ansaru.

Ce dernier mène aussi régulièrement des "actions coordonnées" avec le groupe Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et le Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Les membres d'Ansaru reconnaissent eux-mêmes que certains de leurs éléments ont été formés au djihad dans les mêmes camps d'entraînement que ceux d'Aqmi, en Somalie, au Soudan et au Moyen-Orient.

Reste la question de l’avenir du mouvement. "Contrairement à Boko Hararm, Ansaru est mobile dans le nord nigérian car l’organisation n’a pas de fief", précise Marc-Antoine Pérouse de Montclos. "Aujourd’hui, il ne s’agit plus de se demander si Ansaru va étendre son action vers le sud du Nigeria, à dominante chrétienne, mais quand cela va-t-il avoir lieu". Et d’ajouter, "un attentat perpétré dans le sud du pays aurait alors un retentissement stratégique considérable."