Le groupe français Safran, né de la fusion de l'électronicien Sagem et du motoriste aéronautique Snecma en 2005, est soupçonné d'avoir corrompu des fonctionnaires nigérians afin de remporter un marché de production de cartes d'identité.
AFP - Le groupe d'électronique et de défense Safran a été mis en examen pour des faits présumés de corruption de fonctionnaires du Nigeria commis par son entité Sagem afin d'obtenir en 2001 un juteux marché de production de cartes d'identité dans le pays le plus peuplé d'Afrique.
L'électronicien Sagem, fusionné en 2005 avec le motoriste aéronautique Snecma pour former une nouvelle entité, Safran, est soupçonné d'avoir corrompu des fonctionnaires nigérians dans le but de décrocher ce marché.
L'ancien président nigérian Olusegun Obasanjo avait affirmé en mai 2005 que des responsables de Sagem avaient versé en 2001 des pots-de-vin allant de 30.000 à 500.000 dollars (de 22.800 à 380.600 euros) pour remporter un contrat pour la production de 60 millions de cartes d'identité au Nigeria.
Au total, le contrat portait sur un montant de 214 millions de dollars (163 millions d'euros).
Ces soupçons avaient amené le parquet de Paris à ouvrir en janvier 2006 une information judiciaire pour "corruption d'agent public étranger", un chef passible de 10 ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende.
Le parquet s'était également appuyé sur une dénonciation des autorités de Grande-Bretagne, où une procédure a été engagée pour "blanchiment d'argent" lié à cette affaire de corruption.
L'enquête avait dans un premier temps été confiée à Philippe Courroye, puis aux juges d'instruction Xavière Simeoni et Renaud Van Ruymbeke.
Les deux magistrats ont mis Safran en examen en tant que personne morale en février pour "corruption d'agent public étranger", selon l'avocat du groupe, Me Francis Teitgen, confirmant une information de Médiapart.
Me Teitgen a précisé à l'AFP que "la direction actuelle du groupe Safran n'a rien à voir avec ces faits présumés qui concernent l'ancienne entité Sagem".
"Nous attendons que l'enquête avance, avec de nouveaux éléments, pour prendre position" et éventuellement demander de nouveaux actes d'enquête, a indiqué Me Teitgen.
Deux cadres de Safran, qui ont supervisé ce marché de documents d'identité, ont eux aussi été mis en examen pour le même chef, selon une source proche du dossier. Ils sont soupçonnés d'avoir versé des commissions à plusieurs hauts-fonctionnaires nigérians pour décrocher le contrat.
M. Obasanjo avait pris à partie l'ancien directeur général de Safran, Jean-Paul Béchat, en mai 2005 lors d'un colloque organisé par le Medef et demandé aux autorités françaises de poursuivre ces deux responsables.
"Sagem n'avait pas besoin de graisser la patte à qui que ce soit, mais malheureusement, vous l'avez fait", avait alors déploré l'ancien chef d'Etat.
Une procédure est aussi ouverte aux Etats-Unis où un sous-traitant américain de Sagem est également lié à cette affaire de corruption.
Enfin, au Nigeria, trois ex-ministres et deux responsables impliqués dans cette affaire ont été poursuivis en justice.