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Le 23 septembre, un tribunal du Caire a interdit toutes activités de la confrérie des Frères musulmans et a ordonné la confiscation de ses biens. Interdite mais tolérée sous Hosni Moubarak, elle s'était enregistrée en tant qu'ONG sous Mohamed Morsi pour avoir une couverture légale. Mais tout le monde s'attendait, tôt ou tard, à cette décision, depuis la chute du président islamiste.

Arrivé au sommet du pouvoir en Égypte à la faveur de la révolution du Nil en 2011, la confrérie des Frères musulmans est aujourd'hui au plus bas. La semaine dernière, la justice a banni officiellement toutes les activités de l'organisation islamiste et ordonné la saisie de tous ses avoirs.

La décision n'a pas encore été mise en application mais c'est une nouvelle étape dans la campagne de répression menée par les autorités du pays. Depuis que l'armée a, le 3 juillet, destitué et arrêté le président Mohamed Morsi, lui-même issu de la confrérie, plus de 2 000 membres et la quasi-totalité des dirigeants des Frères musulmans ont été emprisonnés. Ceux qui sont en liberté sont sur le qui-vive.

"Je peux être arrêté à tout moment"

FRANCE 24 a rencontré l'un d'entre eux au Caire. Yasser al-Fakharany, responsable des médias au sein de la confrérie, continue certaines de ses activités. Recherché par les autorités, il dort rarement au même endroit. "Je ne reste pas chez moi, j'essaie de me déplacer souvent, explique-t-il. Je peux être arrêté à tout moment. D'ailleurs, j'ai même été mis en garde de ne pas faire cette interview... mais qu'importe."

Yasser al-Fakharany se sait sur écoute mais il tient à s'exprimer sur la récente décision de justice qui vise à museler la confrérie. "C'est une décision purement politique et injuste, nous ne pouvons l’accepter, indique-t-il. Les Frères musulmans ont une histoire veille de plus de 85 ans, ils sont aux côtés des Égyptiens depuis plus de 80 ans, ils font désormais partie de la société égyptienne. Donc même s’ils sont interdits ou dissous, ils continueront à travailler, rien ne les arrêtera."

Même affaiblie, la confrérie reste déterminée, et ce, alors que de nombreux observateurs estiment que l'étau va se resserrer encore davantage sur le groupe islamiste dans les prochains mois.

"Leurs bureaux sont fermés, ils n'arrivent pas à fonctionner, note Hicham Mourad, rédacteur en chef d'"Al-Ahram Hebdo". Sur le terrain leur travail est complètement désordonné et presque, non pas inexistant, mais en état de désordre total !" Et de poursuivre : "Il y aura plusieurs étapes judiciaires mais je pense qu'à la fin, l'interdiction des Frères musulmans sera prononcée".

Une confrérie de plus en plus impopulaire

Une interdiction souhaitée par une grande partie de la population qui attend leur exclusion définitive de la société égyptienne. Dans un café du centre-ville fréquenté par de nombreux activistes, certains n'hésitent plus à reprendre le vocabulaire de l'armée et qualifient les membres de la confrérie de "terroristes".

"Toutes les activités des Frères musulmans sont contre la nation et les citoyens, juge l’écrivain féministe Afaf el-Sayyed. Ils appellent à la violence et au terrorisme dans toute leurs réunions." Selon cette vétéran de la place Tahrir, la popularité de la confrérie n'a jamais été aussi basse. "Je travaille dans les quartiers et j'ai vu à quel point les gens aujourd'hui excluent les Frères, poursuit Afaf el-Sayyed. À tel point qu'ils refusent de leur vendre quoique ce soit."

Soutenue dans leur campagne de répression contre les Frères musulmans, les autorités poursuivent la mise en place de leur feuille de route dont la prochaine étape est l'écriture d'une nouvelle Constitution. L’une de ses dispositions prévoit déjà d'interdire tous partis religieux…