
Angela Merkel brigue un troisième mandat de chancelière en promettant monts et merveilles sur les sujets sociaux. Son programme, qui met ses alliés libéraux en émoi, fait pressentir une éventuelle alliance gouvernementale avec la gauche.
Qu’arrive-t-il à Angela Merkel ? Depuis le début de la campagne électorale pour les législatives, la chancelière sortante, championne incontestée de la rigueur budgétaire, a mis beaucoup d’eau sociale dans son vin économique. Si, comme la plupart des sondages le suggèrent, la candidate de la CDU rempilait, dimanche 22 septembre, pour un troisième mandat, les Allemands auraient-ils le droit à une pluie de mesures sociales à même de leur faire oublier les pilules d’austérité avalées depuis plusieurs années ?
Le programme commun de la CDU-CSU (l’allié bavarois des chrétiens-démocrates) semble en tout cas le suggérer. L’avalanche de promesses électorales qu’il contient a été évaluée à 28,5 milliards d’euros par le quotidien économique “Handelsblatt”. Une somme qui a fait sortir de ses gonds le FDP, les alliés libéraux de la chancelière au gouvernement. La plateforme politique de la droite allemande serait “guidée par le doux poison des dépenses publiques”, a ainsi regretté au “Handelsblatt” Philip Rössler, le ministre allemand de l’Économie, issu du FDP.
Ce n’est d’ailleurs pas que le montant des mesures proposées qui irrite les libéraux. Angela Merkel promet, en effet, d’instaurer un salaire minimum dans certaines branches, de plafonner l’augmentation des loyers, d’augmenter les allocations familiales et, plus largement, de soutenir fiscalement les familles. Un arsenal de mesures très éloigné d’une politique économique d’inspiration libérale prônée par le FDP. Ce virage à gauche de la candidate Merkel n’a d’ailleurs pas échappé aux sociaux-démocrates du SPD. “Il y a un grand nombre de propositions copiées du programme du SPD”, s’est plaint Axel Schäfer, vice-président du groupe parlementaire du SPD au Bundestag.
Débâcle de la FDP
Pour lui, comme pour certains observateurs, ce programme n’est que de la poudre sociale aux yeux des électeurs allemands. “Si la CDU était véritablement en faveur de toutes ces mesures, elle les aurait déjà appliquées depuis qu’elle est au pouvoir”, soutient Axel Schäfer. Le principal tabloïd allemand, “Stern”, juge qu’Angela Merkel s’est tout bonnement plongée corps et âme dans un “populisme de bas étage” pour tenter de couper l’herbe sous les pieds du SPD.
Mais la droite allemande assure que le programme est tout à fait sérieux : après des années de rigueur pour mettre l’économie allemande en ordre de bataille, les Allemands auraient dorénavant le droit de desserrer un peu la ceinture.
Reste qu’un autre calcul politicien pourrait également expliquer la générosité électorale de la CDU. Angela Merkel cherche peut-être à ménager la gauche en vue d’une éventuelle future grande coalition CDU-SPD, comme entre 2005 et 2009. Les résultats catastrophiques des libéraux du FDP lors des élections législatives en Bavière, le 15 septembre, renforcent l’impression que le discours libéral n’a pas le vent en poupe auprès des électeurs. Avec 3,3% des voix, les alliés actuels d’Angela Merkel n’ont même pas recueilli les 5% de voix nécessaires dans le puissant Land du sud pour être représentés au Parlement régional. Si la tendance bavaroise se confirme au niveau national, le fait d’avoir émis des propositions que le SPD peut trouver acceptables peut servir de base à des négociations pour un gouvernement d’union nationale.