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Twitter et Facebook en libre service quelques heures en Iran

Une demi-journée environ : c’est le temps durant lequel une partie des Iraniens ont pu avoir accès, sans censure, à Twitter et Facebook. Une première depuis 2009 qui était due à une erreur technique d’après le régime.

Pendant environ douze heures, les Iraniens y ont cru. Dans certaines villes du pays, l’accès à Twitter et Facebook était possible en toute liberté, lundi 16 septembre. Une première depuis la fin de la révolution verte qui avait ébranlé le pouvoir de Mahmoud Ahmadinejad en 2009. “Je n’ai pas besoin de passer par un VPN [système permettant de surfer anonymement sur le Web pour contourner la censure, NDLR] pour m’y connecter”, se réjouissait, lundi 16 septembre, un habitant de Téhéran contacté par le quotidien britannique “The Guardian”.

"Bonjour tout le monde, nous pouvons poster sans censure des messages sur Twitter depuis l'Iran" - Thomas Erdbrink, chef du bureau de Téhéran du New York Times

Une liberté qui n'a pas duré longtemps. Mardi matin, les deux réseaux sociaux étaient de nouveau bloqués pour les Iraniens. Le pouvoir a argué d’une “erreur technique”, rapporte l’agence de presse semi-officielle Mehr, pour expliquer cette soudaine liberté d’expression numérique.

Un retour à la “normale” qui a dû en décevoir plus d’un en Iran. Pour plusieurs observateurs, la fin de la censure de Twitter et Facebook aurait été la concrétisation du discours moins rigoriste du nouveau président Hassan Rohani, élu le 4 août 2013. “Son élection a créé un espoir et tout son discours de campagne laissait penser qu’il était en faveur d’une certaine ouverture sur les questions d’accès à l’Internet”, rappelle Moini Reza, responsable du bureau Afghanistan/Iran de Reporters sans frontières (RSF). Le nouvel homme fort de Téhéran, dépeint comme un réformateur, n’est-il pas, lui-même, un fervent utilisateur du site de micro-blogging où il poste des dizaines de messages en anglais (et même en français) par jour ? Certains ont, cependant, remis en cause l’authenticité de ce compte suite, notamment, à un tweet du 3 septembre dans lequel il souhaitait un “joyeux Rosh Hashana [la fête du nouvel an juif, NDLR] à tous les juifs, notamment ceux d’Iran”.

Des ministres 2.0

"Alors que le soleil est sur le point de se coucher, je souhaite à tous les juifs, et spécialement à ceux en Iran, un joyeux Rosh Hashanah"

Reste que Hassan Rohani, peu avant sa prise de fonction à la tête de l’État, avait affirmé au populaire magazine iranien pour jeunes "Chelcheragh" qu’à “l’époque de la révolution digitale, il est impossible de gouverner ou vivre dans un état de quarantaine numérique”. Un message en faveur d’un plus large accès à l’Internet que plusieurs ministres du nouveau gouvernement ont suivi à la lettre. Javad Zarif, le ministre des Affaires étrangères, dispose ainsi d’un compte vérifié par Twitter qu’il met régulièrement à jour et ne se prive pas non plus d’utiliser Facebook pour communiquer. Il en va de même pour Bijan Zanganeh, le ministre du Pétrole, également actif sur Facebook.

Des Iraniens ordinaires ont donc pu croire, pendant une demi-journée, qu’ils étaient logés à la même enseigne numérique que leurs ministres. Ce n’est finalement pas le cas et la seule inconnue qui reste est de connaître la validité de la version officielle. “Je ne crois pas à la thèse de l’erreur, plusieurs fournisseurs d’accès à l’Internet ne peuvent pas avoir en même temps le même problème”, affirme Reza Moini.

Plus qu’une “erreur technique”, Thomas Erdbrink, chef du bureau de Téhéran du "New York Times", penche plutôt pour une “mise à jour” du logiciel de censure de Twitter et Facebook. Dans ce scénario, en lieu et place d’un vent de liberté numérique, Téhéran s’apprêterait donc, d’après Reza Moini, à exercer un contrôle plus “efficace sur les réseaux sociaux”.