Jamais, depuis 1977, les investisseurs américains n’avaient autant parié sur l’Europe. Ils estiment que la crise de la zone euro est finie et que le temps est venu d’effectuer de bonnes affaires sur le Vieux Continent.
La crise de la zone euro, c’est fini. Foi d’Américains. Les investisseurs d’outre-Atlantique ont, en effet, placé 36 milliards de dollars sur les marchés financiers européens durant les six premiers mois de l’année 2013, d’après un rapport publié lundi 8 septembre par la banque d’investissement américaine Goldman Sachs. Un engouement pour l’Europe sans précédent depuis 1977.
Les fonds de pension américains et les grands groupes sont les principaux acteurs de cette vague d’investissements sur les marchés financiers européens. “C’est un signe qu’ils ne croient plus à un risque d’éclatement de la zone euro, comme cela avait été évoqué l’année dernière”, note Christophe Blot, économiste spécialiste de l’Europe pour l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). L’optimisme de ces investisseurs a été conforté, mercredi 11 septembre, par le président de la Commission européenne José Manuel Barroso qui a déclaré que la zone euro avait tourné la page de la récession.
Un signe que l'activité repart
“Le fait qu’ils investissent sur des marchés par actions [donc qu’ils achètent des parts d’entreprises européennes, NDLR] prouve, en plus, que ces fonds estiment qu’il y a des perspectives de croissance et de regain d’activité en Europe”, souligne Christophe Blot. “Les bons chiffres de la production manufacturière en Allemagne et en France démontrent que l’activité repart lentement mais sûrement dans la zone euro”, ajoute Pascal de Lima, économiste en chef chez EcoCell et enseignant à Sciences-Po Paris.
Un éventuel futur économique plus radieux n’est pas la seule raison de cette ruée vers l’Europe. “Les actions des entreprises européennes sont, en moyenne, actuellement largement sous-évaluées”, analyse, dans le quotidien économique britannique “Financial Times”, Robert Parkes, un analyste de la banque HSBC. Les investisseurs estiment donc qu’il y a de bonnes affaires à faire. Notamment dans le secteur bancaire et des nouvelles technologies, d’après HSBC.
“Ils font ce que les Européens ne font pas : investir en Europe au bon moment”, remarque Pascal de Lima. Pour cet expert, cet attrait pour les cieux financiers européens a un avantage : les investisseurs américains viennent, en partie, combler les réticences des banques du Vieux Continent à prêter aux entreprises.
Des investissements d'opportunité, en attendant la reprise en Asie
Mais cet afflux d’argent frais n’est pas pour autant la preuve d’un engagement à long terme de la part des investisseurs américains. Ce sont d’abord, pour partie, des placements d’opportunité : “Les marchés émergents connaissent actuellement un ralentissement économique et ces investisseurs réaffectent temporairement leur argent en attendant que les choses aillent mieux, notamment, en Asie”, précise Pascal de Lima. Lorsque les chiffres en provenance de Chine seront meilleurs, l’argent américain pourrait y retourner.
La situation économique européenne demeure, en outre, fragile. “La Grèce risque d’avoir besoin d’un nouveau plan d’aide et le secteur bancaire européen montre toujours des signes de faiblesse”, rappelle Christophe Blot. La zone euro n’est donc pas à l’abri d’une rechute qui entraînerait un coup d’arrêt à cette manne d’argent venue des États-Unis. Il y a un risque que les Américains “fassent comme les Qataris et qu’ils investissent pendant un ou deux ans puis décident de s’en aller”, prévient Pascal de Lima.