François Hollande présidait mercredi matin un Conseil de défense restreint sur la Syrie au lendemain du report de la réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU. Paris a préparé un projet de résolution que Moscou juge "inacceptable".
Un Conseil de défense restreint sur la Syrie, convoqué et présidé par François Hollande, s'est déroulé mercredi 11 septembre au matin à l'Élysée. Cette réunion d’urgence se tenait au lendemain d’un coup de théâtre à l’ONU où la Russie, après avoir convoqué d’urgence le Conseil de sécurité pour y exposer une "déclaration présidentielle" de Vladimir Poutine, a fini par annuler la réunion.
Ce report a été décidé alors que mardi la Russie a jugé "inacceptable" le projet de résolution proposé par la France visant à contraindre le régime de Bachar al-Assad à neutraliser son arsenal chimique et prévoyant en dernier recours un usage de la force contre Damas.
itUne proposition russe aux contours flous
L’ébauche de résolution de la France fait suite à la proposition russe de faire placer les armes chimiques syriennes sous l’autorité de l’ONU dans le but de les démanteler. Cette initiative, acceptée par Damas, a été accueillie de façon à la fois positive et prudente par Washington. Dans un discours solennel prononcé mardi, le président américain Barack Obama a en effet demandé au Congrès de reporter le vote sur une éventuelle intervention armée en Syrie afin de laisser une chance à la diplomatie pour une sortie de crise.
Car les contours de la proposition russe sont pour le moins flous. S’exprimant sur les ondes de France Inter mercredi 11 septembre, l’ambassadeur russe en France, Alexandre Orlov, a reconnu que "c’est maintenant au Conseil de sécurité d’élaborer une résolution qui prévoit les modalités du contrôle international sous lequel seront placés tous les stocks d’armes chimiques de la Syrie". Il ajoute que la résolution doit aller encore plus loin en demandant à Damas "d’adhérer à la Convention d’interdiction des armes chimiques".
Le diplomate russe souligne que Moscou pose certaines conditions à toute résolution sur la Syrie : en premier lieu que les Occidentaux renoncent au recours à la force, et que le texte n’accuse pas Damas de l’attaque aux armes chimiques du 21 août dernier. Ce sont les raisons pour lesquelles le texte français a été rejeté. "Nous pensons que le projet des Français a été fait à la hâte, en reprenant un texte précédent que nous avions refusé pour ces mêmes raisons", a expliqué Alexandre Orlov. Il ajoute par ailleurs que les suspicions quant à la bonne foi de Damas sont infondées. "Je pense que le gouvernement syrien est tout à fait sincère", assure-t-il.
Le projet de résolution français, un cadre contraignant à l’initiative russe
Loin de partager cet avis, Paris a souhaité par son projet de résolution établir un cadre contraignant à l’idée avancée par les Russes et qui semble se profiler comme une éventuelle solution de sortie de crise. Le projet de résolution que la France entend présenter au Conseil de sécurité de l'ONU impose à la Syrie de déclarer ses armes chimiques dans les 15 jours suivant son adoption et d'ouvrir immédiatement les sites concernés aux inspecteurs des Nations unies, faute de quoi Damas s'exposerait à des mesures punitives.
En cas de non respect par les autorités syriennes des dispositions de cette résolution, des mesures complémentaires pourraient être adoptées en vertu du chapître VII de la charte de l'ONU. Le chapître VII autorise le Conseil de sécurité à infliger des sanctions qui peuvent aller jusqu'au recours à la force. Or Moscou refuse notamment toute référence à ce chapître.
Le texte initial tient également clairement le régime syrien pour responsable du bombardement au gaz sarin du 21 août dans la banlieue de Damas. Il demande en outre la saisie de la Cour pénale internationale, compétente en matière de crimes de guerre, ce que la Russie aura également du mal à accepter.
France, Grande-Bretagne et États-Unis ont entamé mardi des discussions sur ce texte et d'autres négociations sont prévues avec la Russie et la Chine dans les jours qui viennent. Mais selon nombre d’analystes, il se pourrait bien que les modalités du démantèlement des armes chimiques syriennes ne soient l’objet que de négociations bilatérales entre Moscou et Washington. Alexandre Orlov a en effet reconnu que ce qu’on appelle "initiative russe" a bien été évoqué par Barack Obama et Vladimir Poutine lors d’un entretien, imprévu, en marge du sommet du G20.
Avec dépêches