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Mandaté par Bercy pour réfléchir à l’opportunité de nouvelles taxes censées contrer les pratiques fiscales des Google & Co, le Conseil national du numérique a rejeté l’idée d’un nouvel impôt et veut davantage de coopération internationale.

Les Apple, Google et autres spécialistes de l’optimisation fiscale dite “agressive” du secteur des nouvelles technologies peuvent souffler. Du moins en France. Si le gouvernement suit les recommandations du rapport sur la fiscalité numérique qui lui a été remis, mardi 10 septembre, par le Conseil national du numérique (CNNum), aucune nouvelle taxe ne se profile à l’horizon. Il y a fort à parier que la voix de cet organisme public, mis en place pour aider le gouvernement à définir sa stratégie numérique, soit entendu par le gouvernement. Le CNNum avait, en effet, été mandaté par Bercy avant l’été pour réfléchir à l’opportunité de muscler la législation afin de lutter contre les pratiques fiscales des multinationales du secteur qui leur permettent de payer le moins d’impôts possibles en France.

“Nous pensons qu’une taxe instaurée au niveau national risquerait de rater sa cible et de n’affecter les grands groupes qu’à la marge”, a affirmé Godefroy Beauvallet, vice-président du CNNum, lors d’une conférence de presse. En clair, il juge qu’une nouvelle taxe franco-française ferait plus de mal aux jeunes entreprises françaises du numérique qu’aux Google & Co.

“Se faire plaisir politiquement”

Une conclusion qui apparaît comme une remise en question de la proposition phare du rapport Collin et Colin (du nom de leurs auteurs Nicolas Collin et Pierre Colin) sur la fiscalité numérique publié en janvier 2013. Ces deux hauts fonctionnaires de Bercy avaient évoqué la possibilité d’instaurer une taxation de l’exploitation des données personnelles des utilisateurs français par les géants de l’Internet.

Le Conseil national du numérique rejette dans le même élan, et pour les mêmes raisons, les autres propositions de nouveaux impôts tels que les différentes taxes Google sur la publicité en ligne et l’indexation des liens vers des articles de presse sur Google actualités. Autant d’idées qui serviraient, d’après le président du CNNum Benoît Thieulin, “à se faire politiquement plaisir, mais qui desservirait à plus long terme la compétitivité des entreprises nationales”.

Plus de coopération internationale

Pour autant, les auteurs de ce nouveau rapport ne sont pas allérgiques aux taxes, à condition qu'elles soient pensées au niveau supranationale. “Nous pensons seulement que cela desservirait les intérêts de la France si elle adoptait une taxe seule dans son coin”, remarque Benoît Thieulin. L’avis du Conseil national du numérique insiste sur l’opportunité de trouver quelques alliés européens pour essayer de créer un mécanisme européen sur le modèle de la taxe sur les transactions financières actuellement soutenues par onze pays de l’UE. L’Allemagne et la Grande-Bretagne semblent, à ce titre, être des candidats idéaux pour soutenir une telle initiative. Les deux pays se sont, en effet, montrés désireux de trouver un moyen de mieux taxer les activités des grands groupes sur leur territoire.

Le Conseil national du numérique prône une plus grande coopération internationale pour lutter contre l’optimisation fiscale. Si, pour les auteurs du rapport, il est urgent d’attendre pour instaurer une taxe nationale, il est également urgent d’”adapter la fiscalité internationale à l’ère numérique”. Pour ce faire, le CNNum propose que la France porte la bonne parole fiscale auprès des autres pays de l’OCDE afin de faire pression sur les grands groupes du secteur pour plus de transparence. L’une des pistes évoquées serait d’obliger les entreprises à publier leurs résultats d’activité pays par pays, et non plus seulement à l’échelle mondiale. Le Conseil national du numérique aimerait également que la Commission européenne s’empare du sujet “alors que pour l’instant la fiscalité du numérique n’est pas du tout à son agenda”, déplore Benoît Thieulin.

Reste qu’en attendant qu’un embryon de coopération internationale voit le jour, Facebook va pouvoir continuer à ne payer en toute légalité que 191 133 euros d'impôt sur les bénéfices en France en 2012 pour un chiffre d’affaires réel estimé à 300 millions d’euros, comme l’a révélé la radio économique BFM, mardi 10 septembre. Et sans changement de fiscalité au niveau français, l’État ne pourra pas y faire grand chose.