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Cameron présente un plan controversé de lutte contre la pornographie en ligne

Afin de lutter contre la pédopornographie, le Premier ministre britannique a dévoilé une série de mesures très strictes pour limiter l’accès aux contenus X pour les internautes britanniques. Un programme d’ores et déjà très critiqué.

David Cameron s’est trouvé un Goliath à terrasser : la pornographie en ligne “qui salit les esprits des enfants”. Le Premier ministre britannique a dévoilé, lundi 22 juillet, un plan qui contient certaines des dispositions les plus strictes prises par un État démocratique pour lutter contre la pédopornographie sur le Net.

Sa mesure-phare, annoncée lors d’un discours devant la National Society for the Prevention of Cruelty to Children (NSPCC - Association nationale de prévention de la cruauté contre les enfants), est l’instauration par défaut, d’ici fin 2014, d’un filtre anti-pornographie par les fournisseurs d’accès à l’Internet. Ceux qui, parmi les 19 millions d’internautes en Grande-Bretagne, voudront avoir accès à un contenu ouvert à tous les X du monde devront désactiver ce filtre. Une manière de faire pression sur les internautes qui peuvent se demander ce qu'il adviendrait de cette base de données de personnes qui demandent à avoir accès au contenu pornographique en ligne.

Dans la même veine, ce vaste programme prévoit la mise en place d’un filtre similaire pour la navigation sur l’Internet depuis un smartphone et il ne doit plus être possible d’accéder à un site pour adulte depuis un relais Wi-Fi public en Grande-Bretagne. Afin d’améliorer la détection des pédophiles en ligne, le Child Exploitation and Online Protection Centre (CEOP - Centre de protection contre l’exploitation en ligne des enfants) sera, également, chargé de rédiger une liste de mots “odieux” utilisés pour rechercher du contenu illégal.

“Message très clair pour Google, Bing et Yahoo!”

Mais il n’y a pas que les filtres dans ce plan de bataille. La possession d’images “représentant des scènes d’extrême pornographie”, comme celles qui mettent en scène des viols, doit devenir illégalle. Jusqu’à présent, seule la publication de telles images étaient prohibées. Toutes les forces de police travailleront, en outre, sur une base de données communes d’images illégales d’enfants afin de pouvoir mieux coordonner les efforts des autorités pour traquer les sites et forums qui les diffusent en ligne. Le CEOP doit aussi recevoir des pouvoirs accrus pour enquêter sur ces sites qui ne sont référencés par aucun moteur de recherche et ces forums protégés par des mots de passe et qui ne sont pas accessibles sur le Web traditionnel.

Enfin, David Cameron a voulu lancer un “message très clair pour Google, Bing, Yahoo!" leur enjoignant de renforcer, dans les trois mois, leur dispositif pour effacer de leur moteur de recherche tout lien vers des contenus susceptibles de “salir” les esprits des jeunes.

Le "Daily Mail" dit "yes", les autres plutôt "no"

Un ensemble de règles qui a été largement applaudi par le "Daily Mail". Le très populaire tabloïd britannique y a vu un pas important dans la lutte contre la pédopornographie. Il s’est, au passage, réjouit d’une victoire personnelle du journal. Le quotidien a, en effet, fait de la lutte contre la pédopornographie en ligne son principal cheval de bataille. David Cameron l’a d’ailleurs reconnu, assurant : "Le 'Daily Mail' a milité sans relâche et je peux dire aujourd’hui qu’il a été entendu”.

Mais les réactions à ce plan sont beaucoup moins enthousiastes pour le reste de la presse britannique, et carrément négatives pour la plupart des spécialistes de l’Internet. “Le principal problème est de savoir qui va définir ce qui est pornographique et ce qui ne l’est pas”, souligne Paul Bernal, un spécialiste du droit des nouvelles technologies à l’université d’East Anglia (Norwich). Il rappelle ainsi qu’il existe un système de filtrage automatique d’images à caractère pédopornographique qui “est certes efficace pour le commun des internautes, mais n’empêche pas ceux qui recherchent activement ce type de matériel de se le procurer”.

Demander aux moteurs de recherche d’être plus vigilants et mettre en place une “liste noire” de termes à surveiller pour traquer les pédopornographes est, pour le "Guardian", au mieux “de la réthorique politicienne”, au pire “une méconnaissance de ce qu’est l’Internet”. “La plupart des images illégales circulent sur des réseaux privés coupés de l’Internet et contre lesquels les moteurs de recherche ou des “listes noires” ne peuvent pas grand-chose”, renchérit l’ONG britannique de défense d’un Internet libre Open Right Group.

En outre, le principe d’un filtre actif par défaut peut, d’après la BBC, donner une “fausse impression de sécurité aux parents”. “Ils peuvent se sentir déchargés de la responsabilité d’expliquer à leurs enfants ce qui est dangereux ou non sur l’Internet”, souligne le site.