Plus de cinquante personnes ont été blessées par l'explosion d'une voiture piégée, mardi matin, dans la banlieue chiite du sud de Beyrouth, fief du Hezbollah. Une manière de sanctionner le parti de Dieu pour son intervention en Syrie ?
Un attentat à la voiture piégée a secoué, mardi 9 juillet, la banlieue sud de Beyrouth, fief du Hezbollah chiite, faisant au moins cinquante blessés. L’explosion a eu lieu dans un parking, près d'une coopérative commerciale appelée le Centre de coopération islamique, dans le quartier résidentiel de Bir el-Abed. Ce dernier est également réputé pour abriter des permanences du mouvement politico-militaire pro-iranien. On ignore, pour l'instant, si des responsables du parti de Dieu se trouvaient dans le secteur de l'attentat.
Aussitôt après l'explosion, survenue vers 11h (8h GMT), des membres du Hezbollah,
L'ONU condamne l'attentat de Beyrouth
Le Conseil de sécurité de l'ONU a "condamné fermement" mardi l'attentat à la voiture piégée et a appelé les Libanais à "préserver l'unité nationale".
Dans une déclaration adoptée à l'unanimité de ses 15 membres, le Conseil "appelle tous les Libanais à préserver l'unité nationale face aux tentatives pour nuire à la stabilité du pays".
Les 15 pays membres "soulignent l'importance pour tous les partis libanais de respecter la politique du Liban de dissociation" envers le conflit syrien "et de s''abstenir de toute implication dans la crise syrienne, conformément aux engagements pris dans la déclaration de Baabda". (AFP)
munis de talkies-walkies et arborant un bandeau jaune au bras, se sont déployés dans le périmètre de l’explosion. C’est la deuxième fois en quelques mois que le bastion du parti dirigé par Hassan Nasrallah, adossé à la capitale libanaise, est directement visé. À la fin du mois de mai, deux roquettes se sont abattues sur la banlieue sud de la capitale libanaise. Cependant, c’est la première fois depuis 1985 qu’un attentat est perpétré dans cette zone étroitement quadrillée et contrôlée par le mouvement chiite.
Le lien avec la guerre en Syrie "paraît évident"
"Aucune accusation officielle n’a été prononcée pour l’instant, les responsables politiques de tous les bords ont préféré condamner unanimement l’attentat et dénoncer un acte qui vise à semer la discorde dans le pays, précisément entre sunnites et chiites", rapporte Badih Karhani, correspondant de FRANCE 24 au Liban. Ali Mekdad, un député du Hezbollah, a estimé de son côté qu’il s’agissait de "l'œuvre d'agents qui cherchent à créer des tensions au Liban".
"Le lien avec la guerre en Syrie me paraît évident, d’autant plus que c’est la deuxième fois en peu de temps que la banlieue chiite de Beyrouth est frappée, explique à FRANCE 24 Fabrice Balanche, spécialiste de la Syrie et directeur du Groupe de recherche et d’études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient (Gremmo). Les roquettes lancées sur cette région en mai l’avaient été en réponse à l’intervention du Hezbollah en Syrie,
notamment dans la ville de Qousseir." Selon le politologue, il pourrait s’agir d’un acte de vengeance qui a toutefois une finalité stratégique, consistant à menacer le Hezbollah dans son propre fief pour l’obliger à maintenir ses troupes au Liban et l’empêcher d’envoyer trop d’hommes en Syrie.
Le Hezbollah, "responsable moral de l’attentat"
"Pour les auteurs, l’objectif est également de diviser le Hezbollah en liant l’attentat à la présence de ses combattants en Syrie, sachant qu’il existe un clivage entre certains responsables pro-iraniens favorables à l’intervention du mouvement en Syrie et d’autres, plus nationalistes libanais, qui estiment que le parti doit se contenter de lutter contre le voisin israélien et donc de rester au Liban", argumente-t-il.
Côté syrien, la rébellion, qui avait à plusieurs reprises menacé le Hezbollah de représailles sur le territoire libanais s’il ne mettait pas un terme à son implication militaire en Syrie, a condamné l’attentat. Néanmoins, elle a rendu le parti chiite responsable de cette attaque.
"Nous condamnons ce que l’on considère comme un crime terroriste, nous n’accusons personne, cependant le Hezbollah est bel et bien à l’origine de cet attentat, directement ou indirectement, ou du moins il en est responsable moralement de par le climat de tensions confessionnelles qu’il a créé en participant au massacre du peuple syrien depuis plusieurs mois", a déclaré sur l’antenne de FRANCE 24, Louay Mokdad, coordinateur médiatique de l’Armée syrienne libre (ASL).
Et de conclure : "Cet attentat sert directement les intérêts du régime de Bachar al-Assad et ses alliés, qui veulent faire imploser la région".