
Depuis près d'un an, d'importantes quantités d'armes ont été envoyées aux rebelles syriens, avec l'aide du Qatar, par les révolutionnaires libyens. Le "New York Times" a dévoilé, samedi, le mode opératoire de ces transferts d’armes.
À l’heure où les principaux pays appuyant l'opposition syrienne examinaient, ce samedi 22 juin au Qatar, l'octroi d'une aide militaire à la rébellion qui lutte contre le régime du président Bachar al-Assad depuis mars 2011, les "révolutionnaires libyens" n’ont pas attendu qu'un accord intervienne sur cette question. Depuis près d’un an, d’importantes quantités d’armes issues notamment des stocks du colonel Mouammar Kadhafi, le "guide" libyen renversé et tué le 20 octobre 2011, ont été envoyées aux rebelles syriens, selon plusieurs médias.
Ces derniers ont notamment dévoilé les modalités de ces transferts, dont l’existence était déjà connue, puisqu’en avril dernier, l'armée libanaise avait saisi trois containers d'armes en provenance de Libye et destinées à la rébellion syrienne à bord d'un navire arraisonné dans le nord du pays.
"Un effort multinational actif et complexe"
Dans un article daté du 21 juin, le "New York Times" détaille le mode opératoire, en se basant sur des données de vols aériens et les témoignages d’officiels, de contrebandiers, de rebelles et d’analystes. Un travail qui révèle "un effort multinational actif et complexe, financé par le Qatar, pour transporter les armes depuis la Libye jusqu’aux combattants de l’opposition syrienne", écrit le journal.
Si les armes transférées sont en majorité légères, telles que des fusils, des mitrailleuses, des lance-roquettes type RPG, et des obus de mortier, les rebelles libyens ont également envoyé des missiles anti-chars. L’un de ces fournisseurs d’armes libyens, interrogé par l’agence britannique Reuters, estime qu’environ 28 tonnes d'armes ont ainsi été livrées aux rebelles anti-Assad par les airs depuis août dernier. Les avions spécialement affrétés pour l'occasion décollent vers la Turquie ou la Jordanie, où les armes sont ensuite introduites clandestinement en Syrie, rapporte Reuters.
Interrogé par le "New York Times", Fawzi Bukatef, un ancien chef d’une brigade de rebelles libyens, récemment nommé ambassadeur en Ouganda, déclare toutefois que le gouvernement de son pays n’est pas impliqué dans ce transfert d’armes. "Les rebelles procèdent à la récolte des armes, et quand ils atteignent une quantité suffisante, ils l’envoient [vers la Syrie, NDLR]", confie-t-il.
Un organe de l’ASL chargé de la distribution
Ainsi, selon le "New York Times", un avion transporteur C-17 qatari a fait au minimum trois arrêts en Libye cette année, le 15 janvier, le 1er février et le 16 avril. "Les avions sont ensuite retournés à la base aérienne Al-Udeid au Qatar, avant de se rendre à Ankara en Turquie, avec à bord des armes et des équipements en plus de ceux récoltés par les rebelles libyens", précise le quotidien.
Le journal explique que ces armes sont confiées à un réseau d’agences de renseignement et à des responsables de l’opposition syrienne en Turquie. Précisément, c’est le Conseil militaire suprême de l’Armée syrienne libre (ASL) qui traite avec les Qataris et le gouvernement turc.
"À partir de là, les Syriens répartissent les armes selon leurs préférences à des groupes de combattants particuliers, qui à leur tour les distribuent à leurs hommes sur le terrain", indique le journal sur la base de témoignages de rebelles. Selon des activistes, le Conseil militaire suprême de l’ASL "ne distribue généralement pas d’armes à des groupes extrémistes ou fichés sur les listes noires des Occidentaux".
Mais, précise le quotidien, ces derniers n’ont pas beaucoup de difficultés à récupérer ces armes, une fois qu’elles se trouvent sur le territoire syrien, en les achetant directement à des groupes qui les ont réceptionnées. Un aspect qui justement freinait les pays occidentaux qui ne semblent pas enclins à l'idée de fournir des armes sophistiquées aux rebelles, de crainte qu'elles ne tombent aux mains d'extrémistes.