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Vladimir Poutine isolé sur la question syrienne au G8

En marge du G8, Vladimir Poutine et Barack Obama ont affiché leurs divergences sur la question syrienne. Des dirigeants occidentaux évoquent la possibilité de publier une déclaration sur la Syrie sans la Russie à la fin du sommet.

Le président russe Vladimir Poutine risque de se retrouver isolé mardi 18 juin lors de la deuxième journée du G8 où la question de la guerre civile en Syrie éclipse en partie les autres sujets inscrits à l'agenda. Au terme d’une entrevue glaciale d’une heure avec Barack Obama, en marge du sommet, Américains et Russes ont clairement affiché leurs divergences d'appréciation sur ce conflit qui a fait 93 000 morts et ne se sont rejoints que sur la nécessité de négocier.

Obama sceptique sur une action militiaire américaine majeure en Syrie

Le président des États-Unis Barack Obama a exprimé lundi son scepticisme sur toute action militaire américaine majeure en Syrie, comme la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne, doutant que cela puisse modifier le cours du conflit.

"Si vous instaurez une zone d'exclusion aérienne, il se peut que vous ne régliez pas le problème à l'intérieur de cette zone", a-t-il déclaré dans un entretien diffusé lundi soir par la télévision publique américaine PBS.

Au cours de cette interview enregistrée dimanche à la Maison Blanche avant son départ pour le sommet du G8 en Irlande du Nord, Barack Obama répond au journaliste de PBS Charlie Rose: "Il est difficile pour vous de comprendre la complexité de la situation et la manière dont nous ne devons pas nous précipiter dans une guerre de plus au Moyen-Orient". (AFP)

L'ambiance est apparue particulièrement tendue lors de la conférence de presse commune de Barack Obama et Vladimir Poutine lundi soir. Le chef du Kremlin n'a quasiment pas levé les yeux lorsqu'a été évoquée la question du conflit syrien tandis que le président américain s'est à peine tourné vers son homologue. Il s’agissait de la première rencontre en face-à-face des deux dirigeants depuis un an.

"Genève 2", une conférence compromise

"En ce qui concerne la Syrie, nous avons effectivement des points de vue différents sur le problème mais partageons l'intérêt de faire cesser les violences, de neutraliser les armes chimiques, de garantir qu'elles ne sont pas utilisées et qu'elles ne font pas l'objet d'une dissémination", a déclaré Barack Obama.

Ainsi les deux dirigeants ont assuré leur volonté de poursuivre le projet dit "Genève 2" de conférence de paix sur la Syrie. Barack Obama a assuré que son homologue russe et lui-même avaient ordonné à leurs équipes de continuer à travailler à la tenue de cette conférence. Proposée début mai par Washington et Moscou pour permettre l'ouverture de négociations entre les belligérants syriens, cette conférence semble toutefois compromise par l'ampleur des divergences et les récents succès de l'armée syrienne face aux rebelles.

De son côté, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov a déclaré mardi qu'une conférence internationale de paix sur la Syrie ne doit pas signifier la "capitulation" du régime du président syrien Bachar al-Assad : "Nous sommes catégoriquement contre (...) les affirmations selon lesquelles la conférence doit être une sorte d'acte de capitulation publique de la délégation gouvernementale, suivi de la passation des pouvoirs en Syrie à l'opposition", a-t-il affirmé.

Vers une déclaration sans la Russie ?

Le soutien indéfectible que la Russie apporte au gouvernement de Bachar al-Assad suscite les critiques des Occidentaux. Le président François Hollande a ainsi, dès son arrivée au G8, vivement critiqué la Russie qui "continue de livrer des armes au régime de Bachar al-Assad alors que l'opposition n'en reçoit que très peu et qu'elle est aujourd'hui massacrée". Vladimir Poutine, dont le pays est un allié indéfectible du régime de Damas, n'a pas été en reste en mettant en garde les Occidentaux contre toute velléité d'armer les rebelles syriens.

Pour sa part, le principal intéressé, le président syrien Bachar al-Assad, a mis en garde l'Europe par presse interposée. "Si les Européens livrent des armes, l'arrière-cour de l'Europe deviendra (un terrain) pour le terrorisme et l'Europe en paiera le prix", a-t-il menacé dans un entretien au quotidien allemand "Frankfurter Allgemeine Zeitung" à paraître mardi.

La tension visible entre les dirigeants russe et américain était également perceptible aux autres rencontres bilatérales qui se sont tenues entre Vladimir Poutine et ses homologues. Au vu du blocage de la situation, des responsables britanniques ont même évoqué lundi soir la possibilité que les Occidentaux signent, à l'issue de leurs travaux, une déclaration sur la Syrie sans la Russie. "Ne soyons pas dupes. A moins qu'il (Poutine) ne change radicalement de position, nous n'aurons pas de position commune avec lui au G8", avait déjà prévenu le Premier ministre canadien Stephen Harper, à la veille du sommet.

Si un consensus n'est pas atteint à la fin des deux journées du sommet, la possibilité existe en effet de publier un communiqué sans la contribution des Russes et le texte émanerait alors du G7 et non plus du G8.