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Fin de cavale pour le rappeur tunisien Weld El 15

Après trois mois de cavale, le rappeur tunisien Weld El 15, condamné par contumace à deux ans de prison pour des propos violents contre la police dans l’une de ses chansons, se présentera devant les juges jeudi à l’occasion d’un nouveau procès.

En mars, il était en cavale et avait assuré qu’il "ne cèderait pas". Aujourd’hui, Weld El 15, le jeune rappeur tunisien condamné par contumace à deux ans de prison pour "participation à un acte de rébellion", "atteinte aux bonnes mœurs" et "complot formé pour commettre des violences contre des fonctionnaires" dans un clip dont il est l’auteur, a décidé de se présenter devant les juges.

"Un artiste ne peut pas vivre en cavale", explique à FRANCE 24 son avocat, maître Aziz Ghazi Mrabet. Ala Yaacoubi, alias Weld El 15, se rendra donc jeudi 13 juin au tribunal de Ben Arous, dans la banlieue sud de Tunis, pour tenter d’obtenir un non-lieu auquel son avocat ne croit pas vraiment. Deux autres artistes, le réalisateur Mohamed Hedi Belgueyed et l’actrice Sabrine Klibi, qui avaient participé au tournage du clip, ont écopé pour leur part de six mois de prison avec sursis. Difficile, donc, d’espérer une relaxe pour l’auteur du clip, de fait beaucoup plus impliqué que les deux autres dans l’élaboration de la chanson.

D’autant que les paroles du morceau de rap incriminé, "Boulicia Kleb" - "les policiers sont des chiens" - n’ont pas du tout été du goût des autorités tunisiennes. Le texte est en effet particulièrement violent à l’égard des policiers qui mériteraient, selon les mots de Weld El 15, "d’être égorgés à la place des moutons de l’Aïd". De quoi chatouiller la corde sensible des forces de l’ordre.

Un procès test pour la liberté d’expression

Dans un entretien à FRANCE 24 en mars dernier, le chanteur assurait ne faire que répondre à la violence verbale dont la police est coutumière. "J’ai utilisé leur propre langage !", se défendait-il. Pas sûr que les juges soient sensibles à l’argument. Trois autres rappeurs, qui ne faisaient que figurer dans les remerciements, on en effet écopé de deux ans de prison ferme, avant de bénéficier d’une relaxe au terme d’un appel du jugement demandé par leur avocat.

Weld El 15 a mis fin lundi 10 juin à ses trois mois de vie clandestine, qu’il a passés chez des amis à Sousse, à une centaine de kilomètres au sud de Tunis. Un trimestre qu’il n’a pas, semble-t-il, vécu cloîtré, la peur au ventre : il a profité de cette parenthèse dans sa carrière artistique pour passer son permis, écrire quelques textes et aller à la plage…

Reste, pour l’artiste, à croiser les doigts pour que les deux prochaines années de sa vie ne se déroulent pas derrière les barreaux. Pour le Comité de soutien aux artistes de l'affaire Weld El 15, qui n’a cessé de répéter son opposition à "l'emprisonnement des artistes pour le contenu de leurs œuvres", le nouveau procès de Weld El 15 fait office de test pour mesurer le respect des libertés d’expression de "la Tunisie post-révolutionnaire".