
Apple comparaît, à partir de ce lundi, devant la justice américaine pour s'être illégalement entendue avec de grandes maisons d'édition dans le but de relever le prix des livres électroniques.
Apple de nouveau sur le grill aux États-Unis. Après les pratiques fiscales de la marque à la pomme, c'est cette fois son rôle dans la fixation des prix des livres électroniques qui intéresse les autorités américaines.
L'inventeur de l'iPad comparaît, ainsi, devant un tribunal new-yorkais depuis ce lundi 3 juin pour s'être entendu de façon illicite avec cinq grandes maisons d'édition afin de relever le prix des e-books au détriment des consommateurs. La marque à la pomme est la seule entreprise à répondre de ses actes devant la justice, les cinq éditeurs impliqués dans l'affaire ayant préféré passer un accord amiable avec les autorités.
Le français Hachette, les américains HarperCollins (groupe News Corp) et Simon and Schuster (CBS), le britannique Penguin (Pearson) et une filiale de l'allemand Bertelsmann, Macmillan, ont tous accepté de modifier leurs pratiques et de verser, au total, quelque 170 millions de dollars d'amendes et de dédommagements pour les consommateurs lésés.
Au détriment d'Amazon
Apple est accusé par le ministère américain de la Justice et plusieurs États américains d'avoir joué un rôle central de coordination dans une entente avec les éditeurs en vue d'augmenter le prix des livres électroniques lorsqu'il préparait le lancement en 2010 de sa tablette informatique iPad.
Le marché était à l'époque dominé par Amazon et sa liseuse Kindle, lancée en 2007. Mais le distributeur en ligne avait plus ou moins imposé un prix de vente au détail de 9,99 dollars, jugé trop bas par les éditeurs.
Ces derniers craignaient que cela ne nuise à long terme à leurs bénéfices, y compris en entraînant par contagion une baisse des tarifs pour les livres imprimés.
Selon l'accusation, l'entente impliquant notamment Apple a obligé les consommateurs américains à payer "des dizaines de millions de dollars de plus" pour leurs livres électroniques en faisant grimper les prix à des niveaux situés entre 12,99 et 14,99 dollars.
Les détaillants comme Amazon, qui payaient jusqu'alors un prix de gros aux éditeurs et choisissaient librement celui de revente au détail, se sont en effet vu imposer un nouveau modèle : en coordination avec Apple, les éditeurs ont tous en même temps décidé de fixer les prix eux-mêmes et de reverser une commission aux revendeurs - à hauteur de 30 % dans le cas d'Apple.
"Conclusions déraisonnables"
L'accusation entend démontrer qu'Apple savait pertinemment que les acheteurs seraient lésés. Parmi les éléments versés au dossier figure un message aux éditeurs de son ex-patron, Steve Jobs, où celui-ci évoque "un modèle (...) où vous fixez le prix et où nous avons nos 30 %, et où, oui, le consommateur paye un peu plus".
Le successeur de Steve Jobs, Tim Cook, a encore assuré la semaine dernière que son groupe n'avait "rien fait de mal" et comptait "se battre".
Dans un document résumant sa défense et transmis à la justice le 16 mai, Apple évoque des "conclusions déraisonnables à partir d'un patchwork de preuves ambiguës". Il affirme avoir agi "de manière indépendante" et avoir même œuvré en faveur de la concurrence en étant le premier à remettre vraiment en cause la position dominante d'Amazon.
"Ça va être difficile pour Apple de s'en sortir", juge toutefois Roger Kay, un analyste de Endpoint Technologies Associates, qui prévient qu'au-delà d'éventuelles conséquences financières, une condamnation "nuirait de manière importante à la réputation de l'entreprise".
Avec dépêches