"La Première vie d’Angela M.", la nouvelle biographie de la chancelière allemande, révèle qu’Angela Merkel était membre de plusieurs organisations proches du pouvoir communiste est-allemand avant la chute du Mur de Berlin.
Difficile d’imaginer Angela Merkel, la mère rigueur de l’Europe, en responsable de l’”agitprop” (agitation et propagande) communiste à l’époque de l’Allemagne de l’Est ? Pourtant, avant la réunification en 1990, l’actuelle chancelière allemande a activement participé à différentes organisations politiques de l’ex-République démocratique allemande (RDA) où elle a grandi et effectué une partie de sa carrière de scientifique.
C’est le propos de “La Première vie d’Angela M.” ( “Das erste Leben der Angela M”), une biographie critique de la chancelière qui paraît mardi 14 mai en Allemagne. Ces deux auteurs, les journalistes Günther Lachmann et Ralf Georg Reuth, jettent ainsi un pavé dans la mare politique allemande à quelques mois des élections générales de septembre 2013. Surtout qu’Angela Merkel devrait briguer à cette occasion un troisième mandat de chancelière.
Membre de la Jeunesse libre allemande (la branche des Jeunesses communistes de la RDA), de la principale union des travailleurs d’Allemagne de l’Est et de la Société pour l’amitié germano-soviétique : tel est, d’après ce livre, le pédigré communisto-compatible d’Angela Merkel. Elle aurait même été la secrétaire pour l’agitation et la propagande au sein de la Jeunesse libre allemande. Un poste politiquement bien plus sensible que celui de responsable de la culture que la chancelière allemande affirmait jusqu’à présent occuper.
“Pas dépassé les bornes”
Angela Merkel n’aurait pas non plus été une fervente partisane de la réunification après la chute du Mur de Berlin. Celle qui incarne aujourd’hui l’image d’une Allemagne économiquement triomphante aurait, d’après cette nouvelle biographie, préféré en 1989 voir émerger des décombres de l’ex-RDA un État socialiste et démocratique indépendant de la République fédérale d’Allemagne (RFA).
Autant de points qui n’apparaissent pas dans le CV officiel de l’actuelle chancelière. L’opposition s’est d’ailleurs empressée, depuis dimanche 12 mai et la publication dans plusieurs journaux allemands des bonnes feuilles du livre, de demander à Angela Merkel de faire toute la lumière sur son rôle véritable dans l’appareil politique de la RDA. Les chrétiens démocrates de la CDU - le parti d’Angela Merkel - ont quant à eux tenté de minimiser l’impact de ces révélations. “Elle n’a jamais dépassé les bornes de la décence”, a ainsi affirmé lundi Mike Mohring, responsable du parti pour le Land de Thuringe. Une manière de dire qu’elle n’a ni travaillé pour les services du renseignement d’Allemagne de l’Est, ni directement pour le Parti communiste.
La principale intéressée n’a pas, de son côté, démenti ces nouveaux détails biographiques. “Il y a peut-être encore d’autre chose que je n’ai jamais raconté, parce qu’on ne me l’a pas demandé”, s’est bornée à commenter, dimanche 12 mai, Angela Merkel. Sur son rôle au sein des Jeunesses communistes, elle assure ne plus se souvenir d'avoir "fait preuve d'agitation".
Fille de curé
Pour les spécialistes de l’histoire politique d’Allemagne de l’Est, le parcours de jeunesse de la chancelière n’a rien d’étonnant en soi. “Les différentes organisations auxquelles elle a participé étaient autant de passages obligés pour qui voulait pouvoir faire des études et poursuivre une carrière scientifique en Allemagne de l’Est”, a expliqué au magazine "Focus" Stefan Wolle, responsable scientifique du musée de la RDA à Berlin.
Pour cet expert, l’histoire familiale d’Angela Merkel obligeait même la jeune femme à faire preuve de plus de zèle que la moyenne. Son père ayant été dans les ordres, elle partait en effet avec un handicap dans un pays nourri à l’idéologie anti-cléricale du Parti communiste. “En tant que fille d’un curé, elle devait donner davantage de gages au régime que d’autres si elle voulait réussir”, confirme Stefan Wolle.