Alors que les "anti" manifestent dimanche à Paris contre le mariage pour tous, les partisans se réunissent pour défendre le projet de loi, mais aussi dénoncer la montée de l'homophobie. Les actes homophobes sont en forte hausse depuis début 2013.
"Je fais plus attention quand je rentre seule chez moi", témoigne à FRANCE 24, Laure Pora, porte-parole d'Act-Up Paris. Face à la multiplication des actes homophobes, les membres de la communauté homosexuelle ne cachent pas leurs inquiétudes.
De nombreux incidents violents ont été signalés ces derniers jours en France. À Lille, quatre hommes ont été interpellés mercredi après avoir jeté du mobilier contre la vitrine d’un bar gay, tandis qu’à Bordeaux le même soir c’est un client d’un établissement homosexuel qui a été frappé. Dix jours auparavant, un couple gay parisien était également violemment pris à partie à Paris. Le visage tuméfié de Wilfred de Bruijn avait alors fait le tour des médias
Choquées par ces agressions, les associations de défense des homosexuels ont appelé à se rassembler dimanche à Paris. "C’est une manifestation qui était prévue pour défendre le projet de loi sur le mariage pour tous, mais qui s’est trouvée d’autant plus justifiée avec ce qui se passe depuis plusieurs semaines. L’idée, c’est de dénoncer le climat lourd et délétère qui se développe", explique à FRANCE 24, Nicolas Gougain, porte-parole de la fédération Inter LGBT (Lesbiennes, gays, bisexuels et trans).
itForte hausse des agressions homophobes
Pour preuve, l’association SOS homophobie a constaté depuis le début de l’année une forte hausse d’actes homophobes. L’organisme a reçu trois fois plus d’appels et de mails entre le 1er janvier et la fin mars. (1 200 personnes sur trois mois, contre 1 556 sur l'ensemble de l'année 2011).
"Ces chiffres sont un indicateur important car ils permettent de mesurer la libération de la parole homophobe. Il suffit d’aller sur les réseaux sociaux, c’est hallucinant ! Cela n’existait pas lors du débat sur le PACS. Là, les gens se lâchent beaucoup plus, car ils peuvent s’exprimer anonymement", constate Nicolas Gougain.
"On a beaucoup plus peur. Quand on voit que des espaces communautaires comme des bars sont attaqués, on se sent vraiment en insécurité", ajoute Laure Pora.
"La responsabilité des opposants"
Pour Nicolas Gougain, ce climat est une conséquence directe du discours des opposants au mariage pour tous : "Quand vous avez depuis des mois des gens qui expliquent que les homosexuels vont détruire les fondements de la société, vous jouez sur les peurs. Vous créez une vague de parole homophobe. D’autre part, des personnalités comme Frigide Barjot ne lance pas d’appel au calme ou alors ils sont tardifs. Quand elle dit qu’il va y avoir du sang, c’est très grave".
De son côté, Laure Pora s’interroge sur la responsabilité des médias : "Il y a un engouement médiatique qui légitime ces paroles homophobes. Des gens finissent par penser que ce sont des paroles raisonnables. Il n’y a alors plus de limites".
Retour au calme?
Les députés devraient adopter mardi le projet de loi autorisant le mariage pour tous. À l’issue de ce débat, les associations espèrent une diminution des agressions. "Cela ne va pas se calmer du jour au lendemain car les opposants ont annoncé d’autres manifestations, mais à moyen terme, les choses vont rentrer dans l’ordre. Il n’y a qu’à voir en Espagne ou en Belgique, les gens se sont rendus compte qu’il y n’a pas eu les conséquences cataclysmiques ou apocalyptiques qui avaient été annoncées", affirme Nicolas Goudain.
Mais en attendant ce retour au calme, les militants sont bien décidés à continuer le combat. Pour Laure Pora, il reste encore beaucoup à faire pour changer les mentalités : "La loi va passer, mais la vraie question est de savoir si les homosexuels sont capables d’investir l’espace public. Ils doivent montrer qu’ils sont là et qu’ils ne peuvent pas accepter cette homophobie".