![Woods, Armstrong, Pistorius : la série noire de Nike Woods, Armstrong, Pistorius : la série noire de Nike](/data/posts/2022/07/18/1658128319_Woods-Armstrong-Pistorius-la-serie-noire-de-Nike.jpg)
Après les scandales Lance Armstrong et Tiger Woods, Nike est de nouveau éclaboussé par une affaire : celle du champion paralympique Oscar Pistorius. Mais l'équipementier ne semble pas près de changer sa stratégie de starification des athlètes.
Nike n’a pas tardé à réagir après l’inculpation pour meurtre d’Oscar Pistorius. Moins d’une semaine après la mort de la compagne de l’athlète, l’équipementier américain a annoncé la fin de son partenariat avec le champion paralympique sud-africain.
"Nike a suspendu son contrat avec Oscar Pistorius. Nous pensons qu’Oscar Pistorius doit bénéficier d’une procédure [judiciaire] en bonne et due forme et nous continuerons à suivre la situation de très près", a expliqué la marque le 21 février dans un communiqué.
Des scandales à répétition
Le groupe de vêtements et chaussures de sports avait mis beaucoup plus de temps à prendre des sanctions lors des révélations de dopage de Lance Armstrong. Pendant 16 ans, Nike a gardé toute sa confiance au cycliste américain.
Pour Thierry Lardinoit, titulaire de la chaire internationale de marketing sportif à l’École supérieure des sciences économiques et commerciales (Essec), la marque n’a pas voulu refaire la même erreur avec Oscar Pistorius : "Ils se sont vraiment mis en danger en maintenant leur relation avec Armstrong. Il y avait tellement de doutes sur son dopage, c’était devenu tellement évident. La crédibilité de Nike était mise en cause. Pour Pistorius, il s’agissait donc de réagir assez vite."
Éclaboussé par cette sordide histoire de meurtre, Nike a aussi eu peur d’être touché par un nouveau scandale de produits dopants. "S’ils ont réagi aussi vite pour Pistorius, c’est également parce qu’ils ont trouvé des produits douteux chez lui. Il n’est pas encore avéré qu’il s’agit de stéroïdes, mais il y a un risque élevé", estime ainsi Thierry Lardinoit.
La tricherie, la ligne rouge
Selon ce spécialiste, la marque est prête à pardonner certaines frasques de ses athlètes, mais en aucun cas la tricherie. Pour preuve, elle a maintenu son contrat avec le golfeur Tiger Woods après ses aventures extraconjugales ou avec le basketteur Kobe Bryant lors de son procès pour viol. Lance Armstrong a quant à lui été remercié à la suite des révélations contenues dans le rapport d'enquête de l'agence américaine antidopage.
"On a reproché à Tiger Woods d’avoir foncé dans un arbre avec sa voiture pour échapper à sa femme qui l’accusait d’adultère. C’est une affaire privée qui n’entache en rien la force de ses performances. Pour Armstrong, c’était différent car il y a tricherie sur son activité de base : le cyclisme. Armstrong a trompé les gens qu’il inspirait", rappelle Thierry Lardinoit.
Starification à outrance
Bryant, Woods, Armstrong et maintenant Pistorius... Nike souffre de la mauvaise publicité faite par ses sportifs. Mais pour André Richelieu, professeur au département marketing de l’Université Laval au Canada, les répercussions financières sont finalement minimes : "Nike est l'équipementier numéro un au monde, avec une valeur de marque estimée à 15 milliards de dollars, selon Forbes (Adidas, deuxième, est à 5 milliards de dollars). Nike ne dépend pas d'un athlète, d'un sport ou d'une équipe pour être ce qu'elle est devenue."
Malgré ces frasques à répétition, la marque n’est donc pas près de changer sa stratégie de communication. Comme depuis de nombreuses années, elle va continuer à "starifier" les plus grands sportifs. "Les mécanismes d’identification des consommateurs aux stars sont des leviers puissants de commercialisation. On n’est pas encore à la fin de ce modèle", précise Thierry Lardinoit.
Le changement réside plus dans un nouvel état d’esprit. Fini la solidarité entre l’équipementier et ses athlètes. À la moindre incartade, les champions prennent désormais la porte.
"Nike jette littéralement ses athlètes boiteux sans broncher pour les remplacer par d'autres stars ou vedettes montantes. Il suffit de regarder le partenariat qu'il vient de signer avec Rory McIlroy [numéro un mondial de golf]. La publicité, où l'on retrouve Tiger Woods et Rory McIlroy, se veut une passation de pouvoir lourde de sens", conclut André Richelieu.