Devant la Cour pénale internationale, les avocats de Laurent Gbagbo, soupçonné d’être le "co-auteur indirect" de crimes contre l'humanité, dénoncent des accusations fondées sur des éléments transmis par les autorités ivoiriennes.
Au deuxième jour des audiences de la Cour pénale internationale (CPI) destinées à étudier les charges pesant contre Laurent Gbagbo, qui comparaît devant les juges depuis mardi 19 février, la défense s’est employée à démonter les éléments de l’accusation. "Tout se passe comme si le procureur avait été convaincu dès le début qu’il n’y avait qu’un seul responsable au drame ivoirien, a attaqué Me Emmanuel Altit, l’un des avocats de l’ancien président ivoirien, lors de sa déclaration liminaire. Or, selon lui, "il n’existe aucune base factuelle aux accusations […] Le récit du procureur est biaisé car il dépend des éléments transmis par les autorités ivoiriennes." et qu'"il s'agit d'un procès politique".
itL’ancien chef de l’État ivoirien, aujourd’hui âgé de 67 ans, est soupçonné d'être le "co-auteur indirect" de crimes contre l’humanité commis pendant les violences post-électorales de 2010-2011, nées de son refus de reconnaître la victoire d’Alassane Ouattara à la présidentielle, pourtant proclamée par la commission nationale électorale ivoirienne.
"M. Gbagbo et les forces sous son contrôle sont responsables de la mort, des viols, des blessures graves et de la détention arbitraire de nombreux citoyens, respectueux des lois, perçus comme soutenant M. Ouattara", son rival lors de l'élection, avait déclaré, mardi, le procureur de la CPI, Fatou Bensouda, lors de sa déclaration liminaire.
Cette audience de confirmation des charges, d'une durée de huit jours, doit permettre aux juges de la CPI de décider si les éléments de preuves rassemblées par l'accusation sont assez solides pour permettre, plus tard, la tenue d'un procès pour crime contre l’humanité.
Les avocats de Gbagbo ont demandé aux juges de le libérer
L’enjeu pour la défense de Laurent Gbagbo consiste donc, mercredi, "à détruire le dossier du procureur", affirme Stéphanie Maupas, correspondante de FRANCE 24 à La Haye. Selon le bureau du procureur, l’ancien chef de l’État et son entourage avaient fomenté "un plan pour rester au pouvoir à tout prix à travers des attaques mortelles, planifiées avec soin" contre des supporters de son rival. "Le procureur, qui devra prouver que son dossier est solide, dispose de 614 pièces, qui sont des témoignages mais aussi des documents saisis dans la résidence présidentielle de Laurent Gbagbo après son arrestation le 14 avril 2011", précise Stéphanie Maurepas.
Si la défense parvient à "décrédibiliser les pièces présentées, Laurent Gbagbo pourrait bénéficier d’un non-lieu", indique notre correspondante. Mais, sur le fond, les avocats de l’ex-numéro un ivoirien ont d’ores et déjà demandé aux juges de le libérer.
"La défense estime que la CPI ne doit intervenir qu'en dernier ressort, quand un État n'est pas en mesure de juger ses ressortissants. Or la justice ivoirienne fonctionne, explique Stéphanie Maupas, correspondante de FRANCE 24 à La Haye. Bien évidemment, ils ne demandent pas que l'ancien président soit renvoyé devant une cour ivoirienne, mais ils demandent aux juges de se déclarer incompétents et de le libérer."
it