logo

Viande chevaline : la société française Spanghero mise en cause

S'appuyant sur une enquête de la Direction de la répression des fraudes, le ministre délégué à la Consommation, Benoît Hamon, affirme que la société Spanghero savait qu'elle revendait comme viande de bœuf de la viande chevaline.

Dans le scandale de la viande de cheval contenue dans des plats de lasagnes surgelées, on commence à y voir un peu plus clair. Depuis jeudi 14 février, la société agroalimentaire Spanghero est au cœur de tous les soupçons. 

D’après l’enquête des agents de la Direction de la répression des fraudes (DGCCRF), rendue publique ce jeudi, la société française de négoce de viande aurait sciemment commercialisé de la viande de cheval sous l’étiquetage "viande de bœuf". 
"L’enquête démontre que Spanghero savait qu’il étiquetait 'bœuf' potentiellement de la viande chevaline. En tout cas, il y a une suspicion forte", a déclaré le ministre délégué à la Consommation, Benoît Hamon,  jeudi, lors d’une conférence de presse à Paris. 
Trois arrestations dans le scandale de la viande de cheval, en marge de "l'affaire Findus"

Trois hommes soupçonnés de fraude dans le cadre du scandale européen sur la viande de cheval ont été interpellés jeudi au Royaume-Uni, a annoncé la police britannique. Un scandale alimentaire sans aucun rapport avec "l'affaire Findus".

Les interpellations ont eu lieu dans une usine galloise et un abattoir anglais qui avaient été perquisitionnés mardi, a précisé la police dans un communiqué.

La police a procédé à l'arrestation de deux hommes âgés de 64 et 42 ans à l'usine Farmbox Meats près d'Aberystywth (Pays de Galles), et à celle d'une homme de 63 ans à l'abattoir de Peter Boddy à Todmorden, dans le West Yorkshire (nord de l'Angleterre).

La Food Standard Agency (FSA) considère que l'abattoir Peter Boddy a fourni des carcasses de chevaux au fournisseur de viande Farmbox Meats. L'activité des deux entreprises avait été suspendue dans l'attente des résultats de l'enquête en cours. Mardi, la FSA disait chercher à comprendre, avec la police, les circonstances qui "avaient conduit à la vente de produits censés être du bœuf destiné aux kebabs et aux hamburgers, et qui se sont avérés être du cheval".

AFP

À l’issue de ces déclarations, Spanghero, entreprise de plus de 300 salariés spécialisée dans les plats surgelés et la viande transformée, a tenté de mettre en avant "sa bonne foi".  Le président de la société, Barthélémy Aguerre, a qualifié, ce vendredi, le ministre de la Consommation Benoit Hamon de "très léger" et "extrêmement imprudent" dans ses annonces.
"Il met en danger 300 personnes qui travaillent chez Spanghero sans aucune preuve", a déclaré Barthélémy Aguerre à une correspondante de l'AFP .
La chaîne de responsabilité
Si le cas Spanghero est confié à la justice française, des soupçons pèsent également sur la chaîne d'intermédiaires opaques : le trader chypriote Draap, à qui Spanghero a commandé la viande, et son sous-traitant néérlandais. Leur directeur, le Belge Jan Fasen, a déjà été condamné à deux reprises pour des affaires de fraude alimentaire. "Il est bien connu dans le circuit", assure Stéphanie Antoine, chroniqueuse économique de FRANCE 24.
"La lumière sera faite sur les éventuelles manipulations et négligences qui ont eu cours dans ces sociétés",  a assuré Benoît Hamon qui indique qu’une enquête est en cours aux Pays-Bas. Le ministre français de l'Agriculture, Stéphane Le Fol, qui a à coeur de restaurer la confiance du consommateur, a de son côté demandé à Europol, la police criminelle intergouvernementale, d’enquêter.
Benoît Hamon a tenu à préciser que la société roumaine à laquelle Spanghero a acheté la viande de cheval, signalée comme telle par les codes douaniers et la "lettre de voiture" (contrat de transport de marchandises), n’était pas en cause.
"L’abattoir roumain répond aux normes européennes" et il a vendu une viande étiquetée "cheval d’origine roumaine", a poursuivi le ministre, précisant bien qu’"il n’y a aucune raison de douter de la bonne foi de la société roumaine qui a vendu la viande".
it
Benoît Hamon, ministre délégué à la consommation
Comigel a fait preuve de négligences
S'agissant de la société Comigel, qui a fabriqué les fameuses lasagnes à la viande de cheval, distribuées par Findus et Picard entre autres, le ministre a reconnu qu'elle avait été bernée. "Il s'agissait pour Comigel de la viande de bœuf", a-t-il indiqué. Cependant, à ses yeux, cette PME française s'est rendue coupable de "deux négligences en omettant des contrôles qu'elle aurait dû opérer dans son usine luxembourgeoise".
"D'une part, l'étiquette n'était pas conforme à la législation française" puisqu'elle ne précisait que "viande origine UE" alors qu'elle aurait dû mentionner le pays de naissance de l’animal, le lieu d'élevage et le lieu d'abattage, a expliqué le ministre. "D'autre part, lors de la décongélation, elle aurait dû se rendre compte que la viande n'était pas de la même couleur que le bœuf", a-t-il poursuivi.
Comigel a estimé quant à elle que la "tromperie organisée" dont elle a été victime était difficilement détectable. La viande livrée par son fournisseur Spanghero était "cuisinée sans décongélation", rendant impossible "de détecter la tromperie" par sa couleur ou son odeur, et elle portait "l'estampille sanitaire française apposée par Spanghero", s'est défendu le président de Comigel, Erick Lehagre.
La PME, dont le siège social est à Metz et dont l'usine de production des plats incriminés se trouve au Luxembourg, a porté plainte contre X en France et au Luxembourg pour tromperie, falsification et escroquerie.
Les responsables encourent deux ans de prison
Les responsables présumés de ce circuit, qui porterait sur 750 tonnes de viande de cheval et aurait cours depuis plusieurs mois, encourent jusqu’à deux ans de prison pour tromperie et seront traduits, si le délit est avéré, devant un tribunal correctionnel, a dit le ministre.
Spanghero s'est rendu coupable d'une "tromperie économique" et sera poursuivi, a-t-il ajouté, en promettant "d'assainir la filière".
Le gouvernement a demandé la suspension de l’agrément sanitaire de la société Spanghero, qui aurait réalisé un profit de 550 000 euros sur la période suscitée.
  it
"Les carcasses contaminées ne sont pas entrées dans la chaîne alimentaire", Stéphane Le Foll
Viande chevaline : la société française Spanghero mise en cause

France 24 avec dépêches