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Mariage gay : "Nous sommes fiers de ce que nous faisons"

Les députés ont entamé mardi le débat sur le projet de loi ouvrant le mariage aux couples homosexuels. La ministre de la Justice a défendu le "mariage pour tous" avec force durant quarante minutes, dans un hémicycle sous tension.

Deux conceptions radicalement différentes de la famille se sont affrontées mardi, dès l'ouverture du débat sur le mariage homosexuel à l'Assemblée, la majorité mettant en avant l'égalité des droits, et l'opposition les dangers de la négation de la différenciation sexuelle.             

"C'est un acte d'égalité, a proclamé la ministre de la Justice, Christiane Taubira, à l’ouverture des débats sur le projet de loi. Il ne s'agit pas d'un mariage au rabais, il ne s'agit pas d'une ruse, pas d'une entourloupe, il s'agit d'un mariage avec toute sa charge symbolique, et toutes ses règles d'ordre public".

L'Assemblée nationale a repoussé mardi, par 272 voix contre 169, la motion de rejet préalable du projet de loi sur le mariage homosexuel qu'avait défendue au nom de l'UMP Henri Guaino, l'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy.
 

"Ce n'est pas une motion de rejet préalable, mais de regret du passé", a lancé à Henri Guaino Christiane Taubira. "Vous vous agrippez à un ordre que vous vous croyez immuable". Rappelant que jusqu'en 1938, le code civil imposait à la femme "obéissance" à son mari, elle s'est exclamée : "que vous souhaitiez conserver cet aspect du mariage, c'est votre liberté !".
 
"Oser poser des mots sur des sentiments !"
"Vous nous dites que vous connaissez des couples homosexuels qui ne sont pas intéressés à se marier mais je connais infiniment plus d'hétérosexuels qui ne sont pas intéressés à se marier. Il ne me vient pourtant pas à l'idée qu'il faudrait abolir le mariage hétérosexuel". Et d'ajouter,"Nous sommes fiers de ce que nous faisons !"
 
"Nous voulons savoir : qu'est-ce que le mariage des couples homosexuels va enlever aux couples hétérosexuels ?", harangue la ministre de la Justice. "Rien !", répondent en chœur les députés de la majorité. "Alors s'il n'enlève rien, nous allons oser poser des mots sur des sentiments et des comportements !"
 
"Nous parlons d'hypocrisie pour ceux qui refusent de voir ces familles homosexuelles et nous parlons d'égoïsme pour ceux qui s'imaginent qu'une institution de la République pourrait être réservée à une catégorie de citoyens."
 
Guaino : "La loi de la nature" impose un père et une mère
 
Henri Guaino a entamé, à son tour, un plaidoyer en faveur du référendum. L'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, député UMP des Yvelines, a fait référence de nombreuses fois à "la loi de la nature" au sujet de la procréation, en demandant le rejet du projet de loi autorisant le mariage homosexuel.
 
"Ouvrir le mariage aux couples de même sexe, c'est donner le droit d'avoir des enfants à des couples auxquels la loi de la nature ne le permet pas", a expliqué M. Guaino. "Qu'y a-t-il derrière ce texte sinon d'abord la négation de la différence des sexes et dans le domaine où elle est la plus évidente celui de la procréation et celui de la relation à l'enfant ?"
 
"Il ne faut pas tricher avec cette question, il ne faut pas se mentir à ce sujet, c'est un sujet trop grave", a-t-il ajouté. "Dès lors que l'on touche au mariage on implique l'enfant", a-t-il dit. Cela signifie qu'"on est convaincu qu'il n'y a aucune différence entre le père et la mère".
 
Henri Guaino, lui-même orphelin et qui y a fait allusion en évoquant "les accidents de la vie", a fustigé une majorité qui veut que "le social triomphe de la nature et que sa victoire soit sans partage".
 
Le président des députés UMP Christian Jacob a assuré que "la majorité du groupe voterait contre". Cependant, une poignée de députés UMP – ainsi que Jean-Christophe Lagarde, porte-parole du groupe UDI (centriste), et Jean-Louis Borloo, son président – ont d’ores et déjà annoncé qu’ils voteraient en faveur du texte.

Bertinotti : Une "vision généreuse de la famille"

La ministre déléguée à la Famille, Dominique Bertinotti, a ensuite pris la parole, vantant "l'avancée" que représente le projet de loi autorisant le mariage homosexuel, une "vision généreuse de la famille" afin que "plus personne ne soit clandestin dans la République".
 

Considérant cette loi comme une "avancée pour tous", la ministre a déclaré que ce texte répondait à "une vision [de la famille] qui inclut et non qui exclut [...]". "Plus personne ne doit être clandestin dans sa famille, clandestin dans la société, clandestin dans la République", a-t-elle poursuivi.
 
Le mariage pour tous "apportera une réponse aux difficultés concrètes que rencontrent les familles homoparentales dans lesquelles vivent de 40 000 à 300 000 enfants en France", a-t-elle aussi plaidé.
 
Une soixantaine d’orateurs attendus à la tribune
 
La discussion générale sur le projet de loi verra l'opposition défendre ses motions de procédure et devrait se poursuivre jusqu'à mercredi soir. Une soixantaine d'orateurs doivent se succéder à la tribune.
 
Ce n'est que vendredi ou samedi que les députés entreront dans le vif du sujet avec l'examen de l'article premier de ce texte, qui supprime l'exigence de la différence des sexes comme condition du droit au mariage.
FRANCE 24 avec dépêches