L'opposition manifestait ce vendredi à l'occasion du deuxième anniversaire de la révolution. Le siège du parti des Frères musulmans a été incendié à Ismaïliya. Au moins 450 personnes ont été blessées dans des heurts et sept sont mortes.
Des milliers de manifestants protestaient vendredi place Tahrir au Caire mais aussi dans d'autres villes du pays contre le président islamiste Mohamed Morsi pour réclamer une "nouvelle révolution", à l'occasion du deuxième anniversaire du soulèvement populaire qui renversa Hosni Moubarak. "Ça va être une grosse journée [...] parce que les Égyptiens en ont marre", prédisait en début de journée un manifestant, Mohammed Abdallah, en référence à la profonde crise politique et économique que traverse le pays.
Dans une rue menant à l'emblématique place Tahrir, de jeunes Égyptiens lançaient des pierres vers un mur de blocs de béton renforcé par les forces de l'ordre la veille. La police répondait sporadiquement par des tirs de gaz lacrymogène, selon un journaliste de l'AFP. Des échauffourées entre policiers et manifestants se sont aussi produites à Alexandrie et Suez. Environ 450 peronnes ont été blessés dans des affrontements à travers le pays, selon un nouveau bilan du ministère de la Santé. À Suez, une fusillade a fait six morts, a-t-on appris de sources médicales.
Le siège du parti des Frères musulmans incendié
Le siège local du parti des Frères musulmans dans la ville d'Ismaïliya, sur le canal de Suez, a été incendié par les manifestants hostiles au président islamiste égyptien Mohamed Morsi, a rapporté un correspondant de l'AFP. Une victime est à déplorer.
De la fumée noire sortait des fenêtres de locaux du Parti de la liberté et de la justice (PLJ). Les Frères musulmans ont indiqué par ailleurs que des manifestants avaient tenté d'envahir un de leurs locaux au Caire, dans le quartier de Tawfikiya, proche du centre-ville.
Une correspondante de l'AFP sur place a constaté que des manifestants lançaient des pierres contre un immeuble, et se faisaient pourchasser par des résidents. De bruits de tirs étaient également entendus, sans qu'il soit possible de déterminer leur origine et leur nature exacte.
Des heurts avaient déjà opposé jeudi au Caire la police à des manifestants qui tentaient de démanteler ce mur pour pouvoir circuler librement dans le centre-ville. Une vingtaine de personnes avaient été blessées, selon une source médicale. "À bas le pouvoir du Guide" des Frères musulmans, dont est issu le président Morsi, scandaient vendredi les manifestants. "Je suis ici pour exiger la liberté et la justice. L'Égypte a besoin d'une nouvelle révolution pour les jeunes et pour une vraie démocratie", affirmait Chawki Ahmed, 65 ans.
L'opposition, composée de mouvements en majorité de gauche et libéraux et qui affiche une unité encore précaire, a appelé à défiler à travers le pays contre le président Morsi et les Frères musulmans, en reprenant les mêmes mots d'ordre qu'il y a deux ans: "Pain, liberté, justice sociale".
"Sortons vers les places pour finaliser les objectifs de la révolution", a appelé sur Twitter Mohamed El-Baradeï, l'une des figures de proue de l'opposition laïque.
Les forces de l'ordre ont prévu de renforcer leur présence, selon une source de sécurité.
Les Égyptiens appelés à célébrer "pacifiquement"
Jeudi soir, Mohamed Morsi a appelé ses compatriotes à célébrer "de manière pacifique et civilisée" le deuxième anniversaire de la révolte qui avait débuté le 25 janvier 2011.
Face à ses adversaires, le président égyptien se prévaut d'être depuis juin dernier le premier président civil et démocratiquement élu du pays, et a promis de gouverner "pour tous les Égyptiens".
L'opposition l'accuse en revanche de reproduire un système autoritaire et socialement injuste, et de privilégier l'idéologie islamiste sur l'intérêt général.
Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a de son côté demandé aux Égyptiens de s'en tenir aux "principes universels du dialogue pacifique et de la non violence".
Les Frères musulmans n'ont pas officiellement appelé à manifester vendredi. Pour marquer l'anniversaire, ils ont lancé une initiative intitulée "Ensemble nous construisons l'Égypte", consistant en une série d'actions sociales et caritatives.
Le climat est alourdi par l'annonce attendue samedi du verdict dans le procès des responsables présumés de la mort de 74 personnes à l'issue d'un match de football à Port-Saïd (nord-est) en février 2012.
Les "Ultras" du club cairote d'al-Ahly, qui assurent compter la grande majorité des victimes, menacent de manifestations violentes et d'une "nouvelle révolution" s'ils n'obtiennent pas justice.
Outre la crise politique, l'Égypte affronte une grave crise économique, avec l'effondrement des investissements étrangers, la chute du tourisme et un déficit budgétaire en hausse notamment.
Hosni Moubarak, 84 ans dont 30 au pouvoir, malade et condamné à la prison à perpétuité, attend quant à lui un nouveau jugement dans l'indifférence d'une grande partie de la population, pour qui il appartient déjà au passé.
FRANCE 24 avec dépêches